A table !
Introduction au thème
LECTURE DU BO
Identifiez et expliquez les idées principales, les références culturelles et historiques, pour illustrer le rôle du repas dans la société.
Problématique
Ne fait-on que s’alimenter quand on prend un repas ? Si se nourrir est une nécessité pour survivre, se mettre à table dépasse la satisfaction d’un besoin vital : par le rapport au temps qu’il engage, son anticipation ou son improvisation, le repas traduit quelque chose de notre humanité et des coutumes anthropologiques dans lesquelles elle s’inscrit. Dépassant le besoin naturel auquel elle répond, cette pratique, universelle, régulière, parfois itérative à l’occasion de célébrations, se réalise selon des formes et des organisations variées. Solitaire ou collectif, en famille ou entre amis, expéditif ou festif, frugal ou pantagruélique, sinistre ou dionysiaque, le repas est un rituel social, culturel, voire symbolique, dont la portée, les formes ou les enjeux expriment une part de notre rapport au monde, à l’autre, ou à une certaine conception de la civilité, voire de la civilisation.
Ce qui nous semble aller de soi, sous telle latitude – utiliser des couverts ou des baguettes, disposer ou non chez soi d’un espace dédié au repas, déjeuner à la maison ou à l’extérieur, dîner à 17 heures ou à 22 heures –, apparaît comme le fruit d’une lente évolution historique et obéit à des logiques souvent contingentes. Les formes du repas sont ainsi constitutives de notre sociabilité et de notre héritage culturel. De quelle maîtrise de soi et d’intégration au groupe fait-on preuve en respectant des manières de table ? Qu’échange-t-on, que partage-t-on au-delà de la nourriture ? Que se joue-t-il dans le rituel de la table, lieu de mise en scène par excellence, qui peut tour à tour tourner à la fête, au drame, à la scène de séduction, de révélation, à l’humiliation ou à la dérision ? Le repas est en effet un moment où se font et se défont des relations sociales, où se cristallisent des affects et des tensions, où se manifestent des rapports de pouvoir et des inégalités. C’est ainsi autant un objet d’étude privilégié des sociologues, qu’une préoccupation récurrente de la presse et des publicitaires. Car passer à table n’est jamais neutre : il s’y joue, s’y déjoue, s’y renoue ou s’y réinvente toujours plus ou moins un modèle, qu’il s’agisse de la Cène, des ripailles de Gargantua, du Festin de pierre ou des repas de noces dans les romans du XIXe siècle.
Motif infiniment feuilleté, tant littéraire que pictural, théâtral ou cinématographique, il traverse toute l’histoire des arts et des idées, du Banquet de Platon au Charme discret de la bourgeoisie de Luis Buñuel (où tout repas est empêché), alimentant à satiété l’appétit des créateurs comme la fascination des lecteurs et des spectateurs.
Et de nos jours ? Que deviennent ces arts de la table par-delà la généralisation de la malbouffe et l’engouement pour les fast-foods ? Qu’exprime et signifie la surexposition de la gastronomie au travers des émissions de téléréalité et des réseaux sociaux ? Ne mangerait-on désormais qu’à travers un écran ? N’y risque-t-on pas une uniformisation des traditions qui ont fait de la table le foyer vivant de la société, là où se fait ou se défait par essence le lien social ? Ou, au contraire, les cuisiniers, artistes et metteurs en scène contemporains n’inventent-ils pas une scénographie propre à interroger les mutations de notre sociabilité ?
Questions
Comment expliquez-vous l’importance du repas dans votre vie et dans celle de votre famille ?
Quels sont les repas les plus marquants de votre vie et pourquoi ?
Quelles sont les différences que vous observez entre les pratiques alimentaires de votre pays et celles d’autres pays ?
Comment l’alimentation a-t-elle évolué au cours de votre vie ?
Sommaire et sujets d’exposés : 2 ou 3 étudiants par sujet pour une présentation de 5 mns un sujet au choix par chapitre
Cuisines et apparences :
-Étude de la présentation des plats dans différentes cultures, l'influence de la photographie culinaire et des réseaux sociaux, et l'évolution du design culinaire comme art visuel
- Analyser la représentation des repas dans les émissions de téléréalité et sur les réseaux sociaux. Comment ces médias influencent les perceptions des repas et des pratiques culinaires ( réfléchir à la question de l'uniformisation ou de la diversification des traditions.)
Le repas, un acte social :
Les repas de fête : Célébration du lien social à travers les cultures. Exploration des repas festifs dans différentes cultures (mariages, Noël, fêtes religieuses) et leur rôle dans la consolidation des liens familiaux et sociaux.
Le repas d'affaires : Entre convivialité et stratégie. Analyse des repas d'affaires comme espace de négociation et de construction des relations professionnelles, avec un regard sur les codes et les rituels qui les entourent.
Les bonnes manières
Les manières à table : entre tradition et modernité : Discussion sur la pertinence et l'évolution des bonnes manières à table à l'ère contemporaine, où les repas sont souvent plus informels.
L'étiquette à table dans les grandes cours royales : Étude des règles strictes qui régissaient les repas à la cour de France, d'Angleterre ou d'autres monarchies.
Art culinaire et exigences :
- "La haute gastronomie : Un art de la précision et de l'innovation. Étude des exigences de la haute cuisine, des techniques culinaires de pointe aux attentes des clients, et comment l'innovation y joue un rôle central.
- "La quête de l'étoile Michelin : Entre excellence et pression. Analyse des critères pour obtenir une étoile Michelin et des défis auxquels sont confrontés les chefs pour maintenir un niveau d'excellence.
Se nourrir, ne pas se nourrir :
- Le jeûne : Pratiques spirituelles et bienfaits pour la santé. Exploration des différentes formes de jeûne à travers le monde (religieux, thérapeutique) et leurs impacts sur le corps et l'esprit.
- Les troubles alimentaires : Comprendre l'anorexie et la boulimie. Étude des troubles alimentaires, de leurs causes psychologiques et sociales, à leur impact sur la santé et les moyens de prévention et de traitement.
La gourmandise
- La gourmandise au cinéma et dans la littérature : Personnages gourmands et symbolique du plaisir. Exploration des représentations littéraires de la gourmandise, de Gargantua à Harry Potter, et leur signification culturelle et morale.
- "Gourmandise et santé : Entre plaisir et excès. Analyse de la frontière entre la gourmandise saine et les excès alimentaires, avec un regard sur les impacts sur la santé physique et mentale.
Nourriture et Histoire : L’évolution historique des pratiques alimentaires
- "Des festins médiévaux aux repas modernes : L'évolution des banquets à travers les siècles. Étude de l'évolution des banquets, de leur rôle dans la société médiévale à leur transformation en dîners formels ou événements spéciaux dans le monde moderne.
- "Révolutions culinaires : L'impact des découvertes géographiques sur les pratiques alimentaires. Exploration de l'influence des grandes découvertes (échanges de produits comme les épices, le sucre, le café) sur l'évolution des pratiques alimentaires mondiales.
La cuisine comme expression identitaire //La cuisine comme identité territoriale
- Les cuisines régionales françaises : Expression de l'identité et du terroir. Exploration de la diversité des cuisines régionales en France et comment elles reflètent l'identité locale et les traditions du terroir.
-Cuisine et tourisme : Comment les spécialités locales façonnent l'identité d'une région. Exploration de l'impact de la cuisine locale sur l'attractivité touristique et l'identité territoriale, avec des exemples de régions où la gastronomie est un facteur clé du développement touristique.
Quand l’alimentation devient un problème
- L'obésité : Un problème de santé publique mondial. Étude des causes de l'obésité à l'échelle mondiale, des politiques de prévention et des défis que pose ce problème de santé publique.
- La sécurité alimentaire : Les défis du XXIe siècle. Analyse des défis actuels en matière de sécurité alimentaire, de la lutte contre la faim aux enjeux environnementaux et économiques liés à la production et à la distribution des aliments.
Cuisines et apparences
Corpus
« Le repas de noces de Mme Bovary », Madame Bovary, Flaubert, 1856
« Emma au bal de la Vaubyessard », Madame Bovary, Flaubert, 1856
« Cuisine ornementale » Roland Barthes, Mythologies, Paris, Seuil, 1957)
Né le 12 décembre 1821 à Rouen, Gustave Flaubert reste une figure à part de la littérature française du XIXème siècle. Ces textes sont extraits de son roman le plus célèbre, Madame Bovary, paru en 1856 dont le titre original est Madame Bovary : Mœurs de province. Son héroïne a donné son nom au comportement qui consiste à fuir dans le rêve l'insatisfaction éprouvée dans la vie : le bovarysme.
Le repas de noces, au chapitre 4
Emma et Charles viennent de se marier. Voici le récit du repas de noces.
C'était sous le hangar de la charretterie que la table était dressée. Il y avait dessus quatre aloyaux, six fricassées de poulets, du veau à la casserole, trois gigots, et, au milieu, un joli cochon de lait rôti, flanqué de quatre andouilles à l'oseille. Aux angles, se dressait l'eau-de-vie dans des carafes. Le cidre doux en bouteilles poussait sa mousse épaisse autour des bouchons, et tous les verres, d'avance, avaient été remplis de vin jusqu'au bord. De grands plats de crème jaune, qui flottaient d'eux-mêmes au moindre choc de la table, présentaient, dessinés sur leur surface unie, les chiffres des nouveaux époux en arabesques de nonpareille. On avait été chercher un pâtissier à Yvetot, pour les tourtes et les nougats. Comme il débutait dans le pays, il avait soigné les choses ; et il apporta, lui-même, au dessert, une pièce montée qui fit pousser des cris. À la base, d'abord, c'était un carré de carton bleu figurant un temple avec portiques, colonnades et statuettes de stuc tout autour, dans des niches constellées d'étoiles en papier doré ; puis se tenait au second étage un donjon en gâteau de Savoie, entouré de menues fortifications en angélique, amandes, raisins secs, quartiers d'oranges ; et enfin, sur la plate-forme supérieure, qui était une prairie verte où il y avait des rochers avec des lacs de confitures et des bateaux en écales de noisettes, on voyait un petit Amour, se balançant à une escarpolette de chocolat, dont les deux poteaux étaient terminés par deux boutons de rose naturels, en guise de boules, au sommet. Jusqu'au soir, on mangea. Quand on était trop fatigué d'être assis, on allait se promener dans les cours ou jouer une partie de bouchon dans la grange ; puis on revenait à table. Quelques-uns, vers la fin, s'y endormirent et ronflèrent. Mais, au café, tout se ranima ; alors on entama des chansons, on fit des tours de force, on portait des poids, on passait sous son pouce, on essayait à soulever les charrettes sur ses épaules, on disait des gaudrioles, on embrassait les dames. Le soir, pour partir, les chevaux gorgés d'avoine jusqu'aux naseaux, eurent du mal à entrer dans les brancards ; ils ruaient, se cabraient, les harnais se cassaient, leurs maîtres juraient ou riaient ; et toute la nuit, au clair de la lune, par les routes du pays, il y eut des carrioles emportées qui couraient au grand galop, bondissant dans les saignées, sautant par-dessus les mètres de cailloux, s'accrochant aux talus, avec des femmes qui se penchaient en dehors de la portière pour saisir les guides. Ceux qui restèrent aux Bertaux passèrent la nuit à boire dans la cuisine. Les enfants s'étaient endormis sous les bancs.
Emma au bal de la Vaubyessard
Emma, qui s'ennuie ferme dans son rôle d'épouse, déçue par la vie terne et monotone qu'elle mène à Tostes, voit l'espoir d'une vie romanesque et surprenante renaître lorsqu'elle reçoit l'invitation d'un marquis à un bal organisé dans son château de la Vaubyessard.
A sept heures, on servit le dîner. Les hommes, plus nombreux, s'assirent à la première table, dans le vestibule, et les dames à la seconde, dans la salle à manger, avec le marquis et la marquise. Emma se sentit, en entrant, enveloppée par un air chaud, mélange du parfum des fleurs et du beau linge, du fumet des viandes et de l'odeur des truffes. Les bougies des candélabres allongeaient des flammes sur les cloches d'argent ; les cristaux à facettes, couverts d'une buée mate, se renvoyaient des rayons pâles ; des bouquets étaient en ligne sur toute la longueur de la table, et, dans les assiettes à large bordure, les serviettes, arrangées en manière de bonnet d'évêque, tenaient entre le bâillement de leurs deux plis chacune un petit pain de forme ovale. Les pattes rouges des homards dépassaient les plats ; de gros fruits dans des corbeilles à jour s'étageaient sur la mousse ; les cailles avaient leurs plumes, des fumées montaient ; et, en bas de soie, en culotte courte, en cravate blanche, en jabot, grave comme un juge, le maître d'hôtel, passant entre les épaules des convives les plats tout découpés, faisait d'un coup de sa cuiller sauter pour vous le morceau qu'on choisissait. Sur le grand poêle de porcelaine à baguette de cuivre, une statue de femme drapée jusqu'au menton regardait immobile la salle pleine de monde. Mme Bovary remarqua que plusieurs dames n'avaient pas mis leurs gants dans leur verre. Cependant, au haut bout de la table, seul parmi toutes ces femmes, courbé sur son assiette remplie, et la serviette nouée dans le dos comme un enfant, un vieillard mangeait, laissant tomber de sa bouche des gouttes de sauce. Il avait les yeux éraillés et portait une petite queue enroulée d'un ruban noir. C'était le beau-père du marquis, le vieux duc de Laverdière, l'ancien favori du comte d'Artois, dans le temps des parties de chasse au Vaudreuil, chez le marquis de Conflans, et qui avait été disait-on, l'amant de la reine Marie-Antoinette, entre MM. de Coigny et de Lauzun. Il avait mené une vie bruyante de débauches, pleine de duels, de paris, de femmes enlevées, avait dévoré sa fortune et effrayé toute sa famille. Un domestique, derrière sa chaise, lui nommait tout haut, dans l'oreille, les plats qu'il désignait du doigt en bégayant; et sans cesse les yeux d'Emma revenaient d'eux-mêmes sur ce vieil homme à lèvres pendantes, comme sur quelque chose d'extraordinaire et d'auguste. Il avait vécu à la Cour et couché dans le lit des reines ! On versa du vin de Champagne à la glace. Emma frissonna de toute sa peau en sentant ce froid dans sa bouche. Elle n'avait jamais vu de grenades ni mangé d'ananas. Le sucre en poudre même lui parut plus blanc et plus fin qu'ailleurs. Les dames, ensuite, montèrent dans leurs chambres s'apprêter pour le bal.
Cuisine ornementale ,Roland Barthes, Mythologies, Paris, Seuil, 1957
Le journal Elle (véritable trésor mythologique) nous donne à peu près chaque semaine une belle photographie en couleurs d'un plat monté: perdreaux dorés piqués de cerises, chaud-froid de poulet rosâtre, timbale d'écrevisses ceinturée de carapaces rouges, charlotte crémeuse enjolivée de dessins de fruits confits, génoises multicolores, etc.
Dans cette cuisine, la catégorie substantielle qui domine, c'est le nappé: on s'ingénie visiblement à glacer les surfaces, à les arrondir, à enfouir l'aliment sous le sédiment lisse des sauces, des crèmes, des fondants et des gelées. Cela tient évidemment à la finalité même du nappé, qui est d'ordre visuel, et la cuisine d'Elle est une pure cuisine de la vue, qui est un sens distingué. Il y a en effet dans cette constance du glacis une exigence de distinction. Elle est un journal précieux, du moins à titre légendaire, son rôle étant de présenter à l'immense public populaire qui est le sien (des enquêtes en font foi) le rêve même du chic; d'où une cuisine du revêtement et de l'alibi, qui s'efforce toujours d'atténuer ou même de travestir la nature première des aliments, la brutalité des viandes ou l'abrupt des crustacés. Le plat paysan n'est admis qu'à titre exceptionnel (le bon pot-au-feu des familles), comme la fantaisie rurale de citadins blasés.
Mais surtout, le nappé prépare et supporte l'un des développements majeurs de la cuisine distinguée : l'ornementation. Les glacis d'Elle servent de fonds à des enjolivures effrénées: champignons ciselés, ponctuation de cerises, motifs au citron ouvragé, épluchures de truffes, pastilles d'argent, arabesques de fruits confits, la nappe sous-jacente (c'est pour cela que je l'appelais sédiment, l'aliment lui-même n'étant plus qu'un gisement incertain) veut être la page où se lit toute une cuisine en rocaille (le rosâtre est la couleur de prédilection).
L'ornementation procède par deux voies contradictoires dont on va voir à l'instant la résolution dialectique: d'une part fuir la nature grâce à une sorte de baroque délirant (piquer des crevettes dans un citron, rosir un poulet, servir des pamplemousses chauds), et d'autre part essayer de la reconstituer par un artifice saugrenu (disposer des champignons meringués et des feuilles de houx sur une bûche de Noël, replacer des têtes d'écrevisses autour de la béchamel sophistiquée qui en cache les corps). (...)
C'est qu'ici (...) l'irrépressible tendance au vérisme est contrariée - ou équilibrée - par l'un des impératifs constants du journalisme domestique: ce qu'à L'Express on appelle glorieusement avoir des idées. La cuisine d'Elle est de la même façon une cuisine "à idées". Seulement, ici, l'invention, confinée à une réalité féerique, doit porter uniquement sur la garniture, car la vocation "distinguée" du journal lui interdit d'aborder les problèmes réels de l'alimentation (le problème réel n'est pas de trouver à piquer des cerises dans un perdreau, c'est de trouver le perdreau, c'est-à-dire de le payer).
Cette cuisine ornementale est effectivement supportée par une économie tout à fait mythique. Il s'agit ouvertement d'une cuisine de rêve, comme en font foi d'ailleurs les photographies d'Elle, qui ne saisissent le plat qu'en survol, comme un objet à la fois proche et inaccessible, dont la consommation peut très bien être épuisée par le seul regard. C'est, au sens plein du mot, une cuisine d'affiche, totalement magique, surtout si l'on se rappelle que ce journal se lit beaucoup dans des milieux à faibles revenus. Ceci explique d'ailleurs cela: c'est parce qu'Elle s'adresse à un public vraiment populaire qu'elle prend bien soin de ne pas postuler une cuisine économique. Voyez L'Express, au contraire, dont le public exclusivement bourgeois est doté d'un pouvoir d'achat confortable: sa cuisine est réelle, non magique; Elle donne la recette des perdreaux-fantaisie, L'Express, celle de la salade niçoise. Le public d'Elle n'a droit qu'à la fable, à celui de L'Express on peut proposer des plats réels, assuré qu'il pourra les confectionner.
Vers la question sur corpus :
Quels sont les thèmes communs à ces documents ?
Pour les extraits de Madame Bovary, comment qualifieriez-vous le regard porté par le narrateur, par Emma Bovary ?
Quelles critiques sont formulées (implicitement ou explicitement) ?
Les trois textes à l'étude présentent de nombreux points communs, nous en développerons trois : ce sont tous des repas d'exception, les aliments sont présentés de manière sophistiquée et l'accent est mis sur les distinctions sociales.
En effet pour chacun des textes il s'agit de présenter des repas d'exception. Pour le premier extrait de Madame Bovary il s'agit en effet du repas de noces de l'héroïne. À cette occasion, le lecteur assiste à une débauche de nourriture, on note le souci d'abondance grâce aux nombreux adjectifs numéraux « quatre aloyaux, six fricassées de poulets, du veau à la casserole, trois gigots, et, au milieu, un joli cochon de lait rôti, flanqué de quatre andouilles à l'oseille. ». Le narrateur évoque également le fait que pour l'occasion, « on avait été chercher un pâtissier à Yvetot ». Le deuxième extrait de Mme Bovary présente lui aussi un moment particulier celui d'un dîner précédant un bal chez des aristocrates, ceci est mentionné par le narrateur lui-même « les dames montèrent ensuite dans leur chambre s'apprêter pour le bal ». Enfin le texte de Roland Barthes appartenant non pas au genre romanesque mais à la littérature d'idées, décrit la cuisine des magazines et en particulier du magazine Elle qui ne présente que des plats d'exception, raffinés, loin du quotidien, l’essayiste utilisera même l’adjectif « mythique » pour qualifier les mets présentés.
Ainsi ces repas d'exception donnent lieu à des descriptions de plats sophistiqués, très détaillées dans les trois textes. Pour le repas de noces de Madame Bovary, l'attention est particulièrement portée à la décoration du gâteau, qui prend quelques lignes de description en une seule et même phrase. « C’était un carré de carton bleu figurant un temple avec portiques, colonnades et statuettes de stuc tout autour, dans des niches constellées d'étoiles en papier doré ; puis se tenait au second étage un donjon en gâteau de Savoie… » La même idée de sophistication est présente dans le deuxième texte qui relate le repas avant le bal ceci est rendu. On remarquera le souci du détail sur la mise en place des mets, les textures et les formes, dans les descriptions du narrateur interne « les serviettes, arrangées en manière de bonnet d'évêque, tenaient entre le bâillement de leurs deux plis chacune un petit pain de forme ovale. Les pattes rouges des homards dépassaient les plats ; de gros fruits dans des corbeilles à jour s'étageaient sur la mousse ; les cailles avaient leurs plumes » Enfin, sur le même modèle Roland Barthes s'intéresse à l'aspect visuel rendu par les photos des magazines culinaires. Il évoque dans une énumération l'importance portée à la précision des présentations dans l’énumération « champignons ciselés, ponctuation de cerises, motifs au citron ouvragé ».
Ces trois textes permettent également de mettre en relief l'idée que les plats présentés sont souvent des marqueurs sociaux. Ainsi les classes moyennes et populaires sont représentés principalement dans le premier et le dernier texte, la seule personne de classes populaires étant sans doute Madame Bovary elle-même dans le 2e texte qui ne cesse de s'ébahir de ce qu'elle regarde « Le sucre en poudre même lui parut plus blanc et plus fin qu'ailleurs » Le premier extrait de Madame Bovary représente un repas de noces où l'on fait bombance avec des mets assez populaires, exception faite de la pièce montée pour laquelle un effort particulier a été fait. Le deuxième texte met en avant un repas de personnes nanties où des mets d'exception et exotiques apparaissent : « On versa du vin de Champagne à la glace. Emma frissonna de toute sa peau en sentant ce froid dans sa bouche. Elle n'avait jamais vu de grenades ni mangé d'ananas » Roland Barthes quant à lui offre grâce à son texte une comparaison sociologique entre les deux classes. Il relève ainsi le fait que la cuisine d'apparat présentée dans les magazines est à destination, et peut-être contre toute attente, des classes populaires alors que les classes plus aisées se tournent vers de la nourriture plus rustique, du terroir. Son étude contredit ainsi les idées développées par Flaubert dans Madame Bovary : « Elle donne la recette des perdreaux-fantaisie, L'Express, celle de la salade niçoise. Le public d'Elle n'a droit qu'à la fable, à celui de L'Express on peut proposer des plats réels, assuré qu'il pourra les confectionner. »
= Une phrase introductive qui annonce les éléments de réponse
= Un paragraphe par élément de réponse
= Chaque paragraphe confronte les textes demandés dans la consigne
= Chaque paragraphe offre une justification de la réponse en faisant référence (citations) aux textes.
Le repas, un acte social
Le repas, bien plus qu'un simple moment de nutrition, est un acte social fondamental qui renforce les liens entre les individus. Partager un repas crée un espace d'échange et de convivialité, où les conversations s'entremêlent avec les saveurs. Que ce soit en famille, entre amis, ou même entre collègues, le repas permet de tisser des relations, de célébrer des moments importants, et de marquer des pauses dans le rythme effréné de la vie quotidienne. Il incarne un rituel collectif qui transcende les cultures, unissant les gens autour d'une table et d'une expérience commune.
Le repas, Guillaume Apollinaire(1880 - 1918)
IL n'y a que la mère et les deux fils
Tout est ensoleillé
La table est ronde
Derrière la chaise où s'assied la mère
Il y a la fenêtre
D'où l'on voit la mer
Briller sous le soleil
Les caps aux feuillages sombres des pins et des oliviers
Et plus près les villas aux toits rouges
Aux toits rouges où fument les cheminées
Car c'est l'heure du repas
Tout est ensoleillé
Et sur la nappe glacée
La bonne affairée
Dépose un plat fumant
Le repas n'est pas une action vile
Et tous les hommes devraient avoir du pain
La mère et les deux fils mangent et parlent
Et des chants de gaîté accompagnent le repas
Les bruits joyeux des fourchettes et des assiettes
Et le son clair du cristal des verres
Par la fenêtre ouverte viennent les chants des oiseaux
Dans les citronniers
Et de la cuisine arrive
La chanson vive du beurre sur le feu
Un rayon traverse un verre presque plein de vin mélangé d'eau
Oh ! le beau rubis que font du vin rouge et du soleil
Quand la faim est calmée
Les fruits gais et parfumés
Terminent le repas
Tous se lèvent joyeux et adorent la vie
Sans dégoût de ce qui est matériel
Songeant que les repas sont beaux sont sacrés
Qui font vivre les hommes
Balzac La Peau de chagrin , 1831.
Balzac relate l’histoire de Raphaël de Valentin, un jeune homme au coeur brisé et dont l'argent lui fait défaut. Au début du roman, le jeune Raphaël est sur le point de se jeter dans la Seine quand il entre par hasard chez un antiquaire, un certain Vautrin, qui lui donner une peau de chagrin. Celle-ci a le pouvoir de réaliser ses moindres désirs, mais, en contrepartie, Raphaël lui fait don de sa vie : chaque souhait lui coute une part de son existence. Lui qui espère succès et richesse, il sera exaucé. Amour, argent et désirs : le livre regorge de thèmes puissants et la vie y est notamment synonyme d’appétit. Un passage du livre raconte les détails un somptueux diner auquel le personnage et ses amis assistent, chez le banquier Taillefer.
Les deux amis s'assirent en riant. D'abord et par un regard plus rapide que la parole, chaque convive paya son tribut d'admiration au somptueux coup d'oeil qu'offrait une longue table, blanche comme une couche de neige fraîchement tombée, et sur laquelle s'élevaient symétriquement les couverts couronnés de petits pains blonds. Les cristaux répétaient les couleurs de l'iris dans leurs reflets étoilés, les bougies traçaient des feux croisés à l'infini, les mets placés sous des dômes d'argent aiguisaient l'appétit et la curiosité. Les paroles furent assez rares. Les voisins se regardèrent. Le vin de Madère circula. Puis le premier service apparut dans toute sa gloire, il aurait fait honneur à feu Cambacérès, et Brillat-Savarin l'eût célébré. Les vins de Bordeaux et de Bourgogne, blancs et rouges, furent servis avec une profusion royale. Cette première partie du festin était comparable, en tout point à l'exposition d'une tragédie classique.
Le second acte devint quelque peu bavard. Chaque convive avait bu raisonnablement en changeant de crus suivant ses caprices, en sorte qu'au moment où l'on emporta les restes de ce magnifique service, de tempétueuses discussions s'étaient établies ; quelques fronts pâles rougissaient, plusieurs nez commençaient à s'empourprer, les visages s'allumaient, les yeux pétillaient. Pendant cette aurore de l'ivresse, le discours ne sortit pas encore des bornes de la civilité ; mais les railleries, les bons mots s'échappèrent peu à peu de toutes les bouches ; puis la calomnie éleva tout doucement sa petite tête de serpent et parla d'une voix flûtée ; ça et là, quelques sournois écoutèrent attentivement, espérant garder leur raison. Le second service trouva donc les esprits tout à fait échauffés.
Chacun mangea en parlant, parla en mangeant, but sans prendre garde à l'affluence des liquides, tant ils étaient lampants et parfumés, tant l'exemple fut contagieux. Taillefer se piqua d'animer ses convives, et fit avancer les terribles vins du Rhône, le chaud Tokay, le vieux Roussillon capiteux. Déchaînés comme les chevaux d'une malle-poste qui part d'un relais, ces hommes fouettés par les flammèches du vin de Champagne impatiemment attendu, mais abondamment versé, laissèrent alors galoper leur esprit dans le vide de ces raisonnements que personne n'écoute, se mirent à raconter ces histoires qui n'ont pas d'auditeur, recommencèrent cent fois ces interpellations qui restent sans réponse. L'orgie seule déploya sa grande voix, sa voix composée de cent clameurs confuses qui grossissent comme les crescendo de Rossini.
Puis arrivèrent les toasts insidieux, les forfanteries, les défis. Tous renonçaient à se glorifier de leur capacité intellectuelle pour revendiquer celle des tonneaux, des foudres, des cuves. Il semblait que chacun eût deux voix. Il vint un moment où les maîtres parlèrent tous à la fois, et où les valets sourirent. Mais cette mêlée de paroles où les paradoxes douteusement lumineux, les vérités grotesquement habillées se heurtèrent à travers les cris, les jugements interlocutoires, les arrêts souverains et les niaiseries, comme au milieu d'un combat se croisent les boulets, les balles et la mitraille, eût sans doute intéressé quelque philosophe par la singularité des pensées, ou surpris un politique par la bizarrerie des systèmes.
C'était tout à la fois un livre et un tableau. Les philosophies, les religions, les morales, si différentes d'une latitude à l'autre, les gouvernements, enfin tous les grands actes de l'intelligence humaine tombèrent sous une faux aussi longue que celle du Temps, et peut-être eussiez-vous pu difficilement décider si elle était maniée par la Sagesse ivre, ou par l'Ivresse devenue une espèce de tempête, ces esprits semblaient, comme la mer irritée contre ses falaises, vouloir ébranler toutes les lois entre lesquelles flottent les civilisations, satisfaisant ainsi sans le savoir à la volonté de Dieu, qui laisse dans la nature le bien et le mal en gardant pour lui seul le secret de leur lutte perpétuelle. Furieuse et burlesque, la discussion fut en quelque sorte un sabbat des intelligences.
Question : comparez ces deux textes afin de dégager les points communs et les différences
METHODE /
Les questions sur corpus
COMMENT ANALYSER UN TEXTE LITTÉRAIRE ?
Un texte littéraire est le résultat d’un travail sur l’écriture, une création. Analyser un texte littéraire
signifie donc qu’il faut :
- mettre en valeur les intentions de l’auteur,
- mettre en évidence les procédés qu’il utilise pour parvenir à ce but,
- faire comprendre les réactions, les émotions que ce texte provoque chez le lecteur
Pour analyser un texte littéraire, il faut procéder à une double lecture du texte. Chaque
lecture doit être active et vous permettre de comprendre le sens du texte.
■ La première lecture est un travail de repérage et de compréhension globale : il
s’agit d’analyser le paratexte, de définir la nature du document, de dégager le thème
général du texte.
■ La deuxième lecture est plus approfondie et plus littéraire : il s’agit d’identifier les
idées principales, de les hiérarchiser, de reformuler les idées du texte au brouillon,
pour vous les approprier. Il faut caractériser le texte : il s’agit de définir précisément
son genre, son type, son thème, son registre, sa forme et la situation d’énonciation.
Les questions que vous pouvez vous poser face à un texte littéraire :
Caractéristiques du texte
■ Quel est le genre du texte ?
■ Quel est le type de texte ?
■ Quel est le registre du texte ?
■ Quelle est la situation d’énonciation ? Qui parle dans ce texte ?
Les idées du texte
■ Quel est le sujet du texte ?
■ Résumez au brouillon le thème du texte.
■ Quelles sont les différentes idées développées dans le texte ?
■ Quelles émotions sont transmises ?
■ Quelles sont les intentions de l’auteur ?
■ Quel point de vue propose-t-il de la situation narrée ? ( qui raconte ? Qui voit la scène?)
Le lexique
■ Quels sont les champs lexicaux dominants ?
■ Y a-t-il une opposition ou une complémentarité entre ces champs lexicaux ?
■ Quels sont les mots qui se répètent ?
■ Quelle est la connotation des mots ? Est-ce péjoratif ou mélioratif ?
■ Quel est le registre de langue utilisé ? Familier, courant, soutenu ?
Manières de table
Les manières à table sont bien plus que de simples règles de savoir-vivre; elles reflètent les valeurs culturelles et sociales d'une époque. Observer un repas révèle souvent des dynamiques subtiles, telles que le respect de la hiérarchie, l'importance accordée à la convivialité, ou encore la maîtrise de soi. Elles varient selon les cultures, mais partagent un objectif commun : assurer une harmonie lors du repas. Ces conventions, qu'elles concernent l'usage des couverts, la posture, ou les conversations, sont essentielles pour faire de l'acte de manger un moment de partage respectueux et civilisé.
Les Caractères (publiés entre 1688-1696) Jean de La Bruyère Chapitre XI, « De l’homme » « Gnathon »
Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s’ils n’étaient point. Non content de remplir à une table la première place, il occupe lui seul celle de deux autres ; il oublie que le repas est pour lui et pour toute la compagnie ; il se rend maître du plat et fait son propre 1 de chaque service : il ne s’attache à aucun des mets, qu’il n’ait achevé d’essayer de tous ; il voudrait pouvoir les savourer tous tout à la fois. Il ne se sert à table que de ses mains ; il manie les viandes 2, les remanie, démembre, déchire, et en use de manière qu’il faut que les conviés, s’ils veulent manger, mangent ses restes. Il ne leur épargne aucune de ces malpropretés dégoûtantes, capables d’ôter l’appétit aux plus affamés ; le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe ; s’il enlève un ragoût de dessus un plat, il le répand en chemin dans un autre plat et sur la nappe ; on le suit à la trace. Il mange haut 3 et avec grand bruit ; il roule les yeux en mangeant ; la table est pour lui un râtelier 4 ; il écure ses dents, et il continue à manger. Il se fait, quelque part où il se trouve, une manière d’établissement 5, et ne souffre pas d’être plus pressé 6 au sermon ou au théâtre que dans sa chambre. Il n’y a dans un carrosse que les places du fond qui lui conviennent ; dans toute autre, si on veut l’en croire, il pâlit et tombe en faiblesse. S’il fait un voyage avec plusieurs, il les prévient 7 dans les hôtelleries, et il sait toujours se conserver dans la meilleure chambre le meilleur lit. Il tourne tout à son usage ; ses valets, ceux d’autrui, courent dans le même temps pour son service. Tout ce qu’il trouve sous sa main lui est propre, hardes 8, équipages 9 . Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne connaît de maux que les siens, que sa réplétion 10 et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n’appréhende que la sienne, qu’il rachèterait volontiers de l’extinction du genre humain.
1 son propre : sa propriété.
2 viandes : se dit pour toute espèce de nourriture.
3 manger haut : manger bruyamment, en se faisant remarquer.
4 râtelier : assemblage de barreaux contenant le fourrage du bétail.
5 une manière d'établissement : il fait comme s'il était chez lui.
6 pressé : serré dans la foule.
7 prévenir : devancer.
8 hardes : bagages.
9 équipage : tout ce qui est nécessaire pour voyager (chevaux, carrosses, habits, etc.).
10 réplétion : surcharge d'aliments dans l'appareil digestif.
2.Etiquette et savoir-vivre à Table : connaissez- vous les bonnes manières ?, Tables et auberges
« Fais pas ci, fais pas ça, ne parle pas la bouche pleine, ne mets pas tes coudes sur la table… ». Un repas en société est un moment important, pendant lequel le savoir-vivre de chaque convive est jugé et mis à nu. Alors, pour ne pas commettre d’impair, suivez le guide !
Un peu d’histoire …
Les plus anciennes civilisations avaient déjà leurs propres règles. Les Grecs et Romains utilisaient leurs doigts et de grands couteaux pour manger. Mais seuls trois doigts étaient dédiés à cet usage. Bien plus tard, c’est à la cour d’Autriche, puis du Roi Soleil que furent codifiées les règles dites de l’« étiquette » :Extrait du code de la table de la cour d’Autriche : « On ne doit pas se balancer sur sa chaise, […] jeter les os sous la table, cracher dans les assiettes, se moucher dans la nappe, boire bestialement »
A table !
Traditionnellement, il incombe à la maitresse de maison de placer ses invités en alternant hommes et femmes. Pour vous asseoir, attendez donc qu’elle vous indique votre place. Puis pour commencer à manger patientez, le temps que tous les convives soient servis.
Politesse et courtoisie
Contrairement aux idées reçues, l’invité parfait n’arrive pas à l’heure. Il est d’usage d’arriver avec 15 minutes de retard, pour laisser votre hôte finaliser ses préparatifs.
Une fois à table, si l’on vous propose de vous resservir, il est poli de refuser la 1ère fois et d’attendre le second passage pour accepter. Cependant, il est d’usage de ne pas se resservir en fromage.
L’art des bonnes manières
Quelques astuces à connaître pour briller en société …
Concernant les couverts, on utilise d’abord ceux qui sont les plus éloignés de l’assiette. Rappelez-vous le film « Pretty Woman » ! Par contre, saviez-vous que la tradition veut que l’on n’utilise jamais de couteau pour la salade ? Cela remonte au temps où les couverts étaient en argent et s’oxydaient avec le vinaigre. Pendant le repas, si un convive vous demande du sel, ne le lui tendez pas mais posez le sur la table, devant lui. Et si vous voulez attraper quelque chose qui est trop loin, ne prenez pas le risque de barrer la vue de votre voisin, demandez gentiment à ce qu’on vous le passe. Surtout, veillez à éviter les sujets qui fâchent, à savoir : Politique, Argent et Religion.
Pour finir, gare aux superstitions…
• Croiser des couteaux porte malheur car cela rappelle le symbole des duels à l’épée,
• Ne renversez pas de sel, autrefois bien rare et précieux,
• Le pain ne doit pas être posé à l’envers car au Moyen Age, c’était celui destiné aux bourreaux qui était ainsi disposé,
• Et enfin, sachez que renverser du vin augurerait d’un bon présage.
Chaque pays possède ses propres coutumes et traditions en matière de savoir-vivre, n’hésitez pas à nous faire découvrir celles que vous connaissez !!
3.Les bonnes manières à afficher sur le frigo, IDKIDS
Pretty Woman, Le diner https://youtu.be/L6K_Foo47Wo
DOCUMENT COMPLEMENTAIRE
Petit tour du monde des bonnes manières à table , Clémentine Latron, 2018
On vous prévient, cet article risque de remettre en question tout ce que vous avez appris dans votre enfance en termes de bonnes manières…
En Angleterre, on met les mains sous la table
C’est comme ça, et pas autrement. Jubilatoire pour ceux qui se sont fait rabrouer toute leur enfance à grands coups de « Les mains sur la table ! ». NB : une main sous la table suffira, sous peine de ne pas manger grand-chose.
Au Japon, on slurpe ses nouilles
Et plus on fait de bruit en aspirant son bol de ramen, plus on est polis et on montre que l’on apprécie ! Un peu surprenant la première fois que l’on entend ses voisins de table rivaliser de compliments auditifs – et plus difficile à mettre en pratique que l’on ne pourrait le penser. Bavoir conseillé pour les débutants.
En Chine, on rote à la fin du repas
C’est le signe que vous avez vraiment apprécié votre repas – une manière comme une autre de présenter vos compliments au chef !
Chez les Inuits du Canada, quand on apprécie, on se lâche
Comme pour les Chinois – ou presque ! On imagine l’ambiance aux repas de famille.
En Éthiopie, on mange avec les doigts
Ou plus spécifiquement avec la main droite. Il est également de coutume que l’hôte donne lui-même la première bouchée à ses invités, en signe de respect et de bienvenue.
Au Mexique, on ne finit pas son assiette
Sinon cela signifie que votre hôte ne vous a pas fait assez à manger. Il vaut mieux en laisser un peu sur le bord !
En Afghanistan, on embrasse le pain tombé par terre
Si du pain tombe à terre au cours du repas, on le ramasse et on l’embrasse en signe de respect avant de le replacer sur son assiette et de le manger.
En Italie, on ne coupe JAMAIS ses spaghetti
Jamais. Sous peine de regards horrifiés et d’atroces représailles. Il n’y a rien de pire pour les Italiens, à part devoir vivre sans bidet. On les enroule laborieusement autour de sa fourchette en utilisant une cuillère et on enfourne le tout sans broncher.
Question : par quels moyens chacun des documents invite-t-il le lecteur à prendre conscience de l’importance des bonnes manières ?
Sujet d’essai : En quoi les bonnes manières à table, loin d'être de simples conventions superficielles, jouent-elles un rôle essentiel dans la construction des relations sociales et la transmission des valeurs culturelles ?
Art culinaire et exigence
L'art culinaire est une discipline où l'exigence joue un rôle central, transformant la cuisine en une forme d'expression raffinée. Chaque détail compte : de la sélection rigoureuse des ingrédients à la précision des techniques de cuisson, en passant par l'harmonie des saveurs et l'esthétique de la présentation. Cette quête de perfection pousse les chefs à innover constamment, à repousser les limites de leur créativité, tout en respectant les traditions et les savoir-faire. L'exigence en cuisine n'est pas seulement un gage de qualité, mais aussi un hommage au plaisir des sens, où chaque plat devient une œuvre d'art à part entière.
« La mort de Vatel » Extrait d'une lettre à sa fille de Madame la Marquise de Sévigné (Marie de Rabutin-Chantal, 1626-1696)
À Paris, ce dimanche 26e avril [1671] Il est dimanche 26 avril;
Cette lettre ne partira que mercredi; mais ceci n'est pas une lettre, c'est une relation que vient de me faire Moreuil, à votre intention, de ce qui s'est passé à Chantilly touchant Vatel. Je vous écrivis vendredi qu'il s'était poignardé : voici l'affaire en détail. Le Roi arriva jeudi au soir; la chasse, les lanternes, le clair de la lune, la promenade, la collation dans un lieu tapissé de jonquilles, tout cela fut à souhait. On soupa; il y eut quelques tables où le rôti manqua, à cause de plusieurs dîners où l'on ne s'était point attendu. Cela saisit Vatel ; il dit plusieurs fois : « Je suis perdu d'honneur; voici un affront que je ne supporterai pas.» Il dit à Gourville : « La tête me tourne, il y a douze nuits que je n'ai dormi ; aidez-moi à donner des ordres. » Gourville le soulagea en ce qu'il put. Ce rôti qui avait manqué, non pas à la table du Roi, mais aux vingt-cinquièmes, lui revenait toujours à la tête. Monsieur le Prince1 alla jusque dans sa chambre, et lui dit : « Vatel, tout va bien, rien n'était si beau que le souper du Roi. » Il lui dit : « Monseigneur, votre bonté m'achève; je sais que le rôti a manqué à deux tables. -- Point du tout, dit Monsieur le Prince, ne vous fâchez point, tout va bien. » La nuit vient : le feu d'artifice ne réussit pas, il fut couvert d'un nuage; il coûtait seize mille francs. À quatre heures du matin, Vatel s'en va partout, il trouve tout endormi; il rencontre un petit pourvoyeur qui lui apportait seulement deux charges de marée; il lui demande: « Estce là tout? » Il lui dit: « Oui, Monsieur. » Il ne savait pas que Vatel avait envoyé à tous les ports de mer. Il attend quelque temps; les autres pourvoyeurs ne viennent point; sa tête s'échauffait, il croit qu'il n'aura point d'autre marée; il trouve Gourville, et lui dit : « Monsieur, je ne survivrai pas à cet affront-ci; j'ai de l'honneur et de la réputation à perdre. » Gourville se moqua de lui. Vatel monte à sa chambre, met son épée contre la porte, et se la passe au travers le coeur; mais ce ne fut qu'au troisième coup, car il s'en donna deux qui n'étaient pas mortels: il tombe mort. La marée cependant arrive de tous côtés; on cherche Vatel pour la distribuer; on va à sa chambre; on heurte, on enfonce la porte; on le trouve noyé dans son sang; on court à Monsieur le Prince, qui fut au désespoir. Monsieur le Duc 2 pleura; c'était sur Vatel que roulait tout son voyage de Bourgogne. Monsieur le Prince le dit au Roi fort tristement: on dit que c'était à force d'avoir de l'honneur en sa manière; on le loua fort, on loua et blâma son courage. Le Roi dit qu'il y avait cinq ans qu'il retardait de venir à Chantilly, parce qu'il comprenait l'excès de cet embarras. Il dit à Monsieur le Prince qu'il ne devait avoir que deux tables et ne se point charger du reste. Il jura qu'il ne souffrirait plus que Monsieur le Prince en usât ainsi; mais c'était trop tard pour le pauvre Vatel. Cependant Gourville tâche de réparer la perte de Vatel; elle le fut : on dîna très bien, on fit collation, on soupa, on se promena, on joua, on fut à la chasse; tout était parfumé de jonquilles, tout était enchanté. . . .
1 Le Prince de Condé, parent du Roi, prince de sang de la maison Bourbon-Condé
2 Le Duc d'Enghien, fils du Prince de Condé
STORY Quand la cuisine devient un art, Valérie de Comme des Français
Classée en 2010 au patrimoine culturel immatériel de l'humanité, la gastronomie française a une longue histoire remontant, au moins, au Moyen Age. Notamment constituée de savoir-faire régionaux (devenus nationaux ou internationaux), de traditions variant selon les époques et d’une exigence sur la qualité des ingrédients, cet art culinaire occupe aujourd’hui une place centrale dans le patrimoine français.
Bien plus qu’une simple dégustation de plats
Produit d'une histoire riche et complexe, la cuisine française s’est nourrie de diverses influences culturelles et géographiques. Art vivant se renouvelant sans cesse, elle a été influencée par des siècles de tradition, d'innovation et de passion.
Remontons les grandes pages de son histoire :
Des débuts médiévaux : sous l’influence de l'héritage romain et germanique, les recettes créées entre le 5 et 15ème siècles incluent pas mal d’épices et d’herbes aromatiques. Principalement constitués de fruits et de viandes, les plats utilisent alors généreusement le miel comme conservateur et exhausteur de goût.
A la Renaissance, sous l’influence politique, économique et culturelle des Rois, l’histoire de la gastronomie française prend un tournant majeur : les techniques de cuisson deviennent plus sophistiquées, les recettes s’enrichissent de nouveaux ingrédients comme le chocolat ou les épices orientales et les plats sont de plus en plus raffinés.
La découverte d'un mets nouveau fait plus pour le bonheur du genre humain que la découverte d'une étoile.
Au 17ème siècle c'est l’église qui enrichit l’histoire de ce patrimoine immatériel : les couvents et monastères deviennent en effet des laboratoires culinaires où les religieuses perfectionnent la préparation des aliments et inventent la confiture, la pâtisserie et la confiserie. En intégrant dans leurs recettes des ingrédients nouveaux (comme le sucre devenu abordable grâce aux échanges commerciaux), elles créent également les sauces, une future composante essentielle des mets français.
C’est dans ce sillage que de nombreuses recettes régionales émergent ou plutôt s’affirment : à partir de recettes souvent ancestrales, chaque région fait rayonner ses produits locaux, développant ainsi les saveurs et, par extension, le palais des gourmets. Ceux-ci peuvent ainsi apprécier des spécialités aussi différentes que le coq au vin de Bourgogne, la choucroute alsacienne ou le cassoulet du Languedoc.
Le 1er chef superstar
Dernière étape de cette gourmande lignée : le 19ème siècle et les différents apports d’Auguste Escoffier. Avec lui, la cuisine se structure en codifiant un ensemble de normes : méthodes de cuisson, règles de présentation, associations de saveurs... L’inventeur de la Pêche Melba, du Tournedos Rossini ou de la crêpe Suzette a su respecter les traditions tout en innovant et, de la création du menu du jour à l’organisation optimisée des brigades de cuisine, ses principes ont jeté les bases de la cuisine classique française telle que nous la connaissons aujourd'hui.
Tradition et innovation, influences variées, enrichissement permanent et - ingrédient crucial de cette recette - goût des Français pour la bonne chère et le plaisir de partager un repas (les arts de la table sont d’ailleurs, eux aussi, classés au patrimoine mondial de l’UNESCO) : la gastronomie élevée au rang d’art ne pouvait naître qu’au pays de la Tour Eiffel, cet autre patrimoine faisant rayonner la France dans le monde entier.
Pour profiter de la dynamique scène gastronomique française, rendez-vous sur le terrain. Marchés riches en saveurs locales, bistrots authentiques, prestigieuses adresses où exercent les nouvelles stars des fourneaux ou simples repas familiaux respectant une recette transmise de génération en génération : c’est partout et tout le temps que la France fait vivre ce bel héritage.
La gastronomie, art ou artisanat ?
La gastronomie se situe à la frontière entre l'art et l'artisanat, mêlant créativité et savoir-faire technique. En tant qu'art, elle permet aux chefs de s'exprimer à travers des créations uniques, en jouant avec les saveurs, les textures et les présentations visuelles pour susciter des émotions. Mais elle est aussi un artisanat, car elle repose sur une maîtrise rigoureuse des techniques culinaires et des ingrédients, nécessitant un apprentissage précis et une répétition constante. Ainsi, la gastronomie allie innovation artistique et discipline artisanale
Introduction : Plat signature du chef étoilé Jérôme Nutile : « Rencontre entre l’huile bio de Camargue et le taureau AOP bio de Camargue »
Qu'est-ce qui rend ce met appétissant ?
Pensez-vous que le dressage d'un plat puisse rehausser son apparence et sa saveur ?
Avez-vous déjà cuisiné et créé une assiette attirante ?
La passion de Dodin Bouffant https://youtu.be/_Cr8YcWPWeI
Ecoutez et regardez attentivement , quel lexique artistique est utilisé ?
Document 1 : Federico Zancanaro « La gastronomie ,un art majeur ? » , Sciences humaines numéro 338, juillet 2021
Du culinaire à l'art , trois freins
Si la gastronomie formalise donc la consommation de mets, la cuisine relève-t-elle pour autant d'une activité artistique ? […]
Le premier frein est de nature scientifique. La « bouffe » est un sujet futile, il n'est pas sérieux d'y faire carrière[…]
Le 2e frein est de nature artistique. Dès sa conception, l'art appartient aux sciences de l'esprit.La cuisine, relevant du corps , ne peut être considérée comme tel. […] d'autres freins artistiques sont également à chercher dans le caractère éphémère des œuvres culinaires ou dans la dimension manuelle artisanale menacée de mécanisation de la production.
Le troisième et dernier frein est de nature professionnelle […] le long et difficile apprentissage du métier de cuisinier avant une possible reconnaissance institutionnelle ne peut que laisser des traces. Même si les chefs reconnaissent composer des œuvres, ils font néanmoins preuve de relative fausse modestie pour la plupart d'entre eux comment, alors, comprendre la diffusion de l’expression « art culinaire » dans la société pour désigner une activité perçue initialement comme prosaïque ou triviale artisanale ou domestique : la cuisine ?
Le cuisinier en artiste
L’effrangement de l'art au 20e siècle (son extension au cinéma, à la photographie, au théâtre, etc.) a fait émerger dans la société le sentiment largement répandu selon lequel la faculté de créer n'est pas réservée aux artistes dits légitimes. L'art s’étend désormais à tous les domaines de l'activité et de l'entreprise humaine […]
Le cuisinier artiste se distingue ainsi du cuisinier amateur et artisan en créant des œuvres « jamais » produites donc rares, fruit de sa personnalité. La différence ne tient ni à la maîtrise technique ni à la capacité de reproduire des œuvres culinaires existantes (travail d'artisan) mais à la faculté de créer des œuvres complexes et esthétiques (travail d'artiste)
Deux postures de cuisiniers artistes peuvent être identifiées : celles de créateurs et celles d'interprètes. Parmi les « grands » cuisiniers artistes depuis la seconde moitié du 17e siècle, il y a ceux qui ont créé de nouvelles œuvres, et /ou ceux qui ont interprété avec le plus grand « talent » des œuvres déjà produites en y introduisant une part personnelle d'interprétation ( les deux postures pouvant être repérées chez un artiste dit légitime)
Au sens figuré, ce terme désigne l'élargissement du domaine de l'art.
Définissez le mot gastronomie
Expliquez la phrase soulignée dans le texte
Précisez ce qui différencie le cuisinier artisan et le cuisinier créateur
Document 2 : Cyrano de Bergerac,Acte II,» La rôtisserie des poètes» Edmond Rostand, 1897
AGUENEAU, PÂTISSIER, puis LISE.
(Ragueneau, à la petite table, écrivant d’un air inspiré, et comptant sur ses doigts.)
Premier pâtissier, apportant une pièce montée.
Fruits en nougat !
Deuxième pâtissier, apportant un plat.
Flan !
Troisième pâtissier, apportant un rôti paré de plumes.
Paon !
Quatrième pâtissier, apportant une plaque de gâteaux.
Roinsoles !
Cinquième pâtissier, apportant une sorte de terrine.
Bœuf en daube !
Ragueneau, cessant d’écrire et levant la tête.
Sur les cuivres, déjà, glisse l’argent de l’aube !
Étouffe en toi le dieu qui chante, Ragueneau !
L’heure du luth viendra, — c’est l’heure du fourneau !
(Il se lève. — À un cuisinier.)
Vous, veuillez m’allonger cette sauce, elle est courte !
Le cuisinier.
De combien ?
Ragueneau.
De trois pieds.
(Il passe.)
Le cuisinier.
Hein !
Premier pâtissier.
La tarte !
Deuxième pâtissier.
La tourte !
Ragueneau, devant la cheminée.
Ma Muse, éloigne-toi, pour que tes yeux charmants
N’aillent pas se rougir au feu de ces sarments !
(À un pâtissier, lui montrant des pains.)
Vous avez mal placé la fente de ces miches :
Au milieu la césure, — entre les hémistiches !
(À un autre, lui montrant un pâté inachevé.)
À ce palais de croûte, il faut, vous, mettre un toit…
(À un jeune apprenti, qui, assis par terre, embroche des volailles.)
Et toi, sur cette broche interminable, toi,
Le modeste poulet et la dinde superbe,
Alterne-les, mon fils, comme le vieux Malherbe
Alternait les grands vers avec les plus petits,
Et fais tourner au feu des strophes de rôtis !
Un autre apprenti, s’avançant avec un plateau recouvert d’une assiette.
Maître, en pensant à vous, dans le four, j’ai fait cuire
Ceci, qui vous plaira, je l’espère.
(Il découvre un plateau, on voit une grande lyre de pâtisserie.)
Ragueneau, ébloui.
Une lyre ! *
L’apprenti.
En pâte de brioche.
Ragueneau, ému.
Avec des fruits confits !
L’apprenti.
Et les cordes, voyez, en sucre je les fis.
Ragueneau, lui donnant de l’argent.
Va boire à ma santé !
* Instrument de musique, symbole de l'inspiration poétique dans la mythologie la Lyre est associée aux dieux des arts, de la musique et de la poésie.
Recherchez qui est François de Malherbe et ce qui caractérise sa poésie, dite pourquoi Rostand fait référence au poète François Malherbe.
Surligner les termes renvoyant au lexique de la poésie
Justifier l'éblouissement de Ragueneau à la vue de la brioche.
Document 3 : Couverture du magazine Arts et Gastronomie, printemps 2020
Recherchez qui sont Serge Viera, Cyril Lignac Jean Sulpice Sébastien Bras, Emmanuel Renault, Jacky Ribault
Repérez les termes qui appartiennent au domaine de l'art, de la créativité
Indiquez ce qui fait l'originalité du plat représenté
Confronter les documents du corpus :
Question sur les documents 1 et 2 : dites en quoi la cuisine est représentée comme une activité précise et rigoureuse.
Question sur les documents 2 et 3 : expliquez en quoi la cuisine convoque plusieurs sens
Question sur les documents un 2 et 3 : expliquez en quoi l'activité culinaire revêt une dimension artistique
Vers l'essai
Un chef cuisinier peut-il être considéré comme un artiste vous traiterez le sujet de façon personnelle et argumentée en vous appuyant notamment sur vos lectures sur le corpus et sur votre culture personnelle
Se nourrir/ Ne pas se nourrir
Nutrition humaine
La nutrition humaine est essentielle pour le maintien de la santé et du bien-être, influençant chaque aspect de notre vie, de l'énergie quotidienne à la prévention des maladies. Elle consiste à fournir à notre corps les nutriments nécessaires, tels que les vitamines, minéraux, protéines, glucides et lipides, en proportions équilibrées. Une alimentation variée et adaptée aux besoins individuels permet non seulement de répondre aux exigences physiologiques, mais aussi de soutenir le développement cognitif, la performance physique et la longévité
Objectifs :
- lire un texte d’idées court et en dégager les enjeux
- répondre à une question de façon structurée et précise
- confronter plusieurs textes d’idée
Questions :
Que vous évoque le titre de la séance : « Nutrition humaine»?
Texte 1 : « Nutrition humaine » ,J. Trémolière, , Encyclopédie de la Pléiade, 1969.
Physiologiquement et biochimiquement, la nutrition de l'Homme ne diffère que par quelques détails de celle des Mammifères monogastriques, comme le Rat et le Porc. Les amino-acides, les vitamines, les minéraux qui sont indispensables, ses sources glucido-lipidiques d’énergie sont les mêmes. Le génome des Mammifères est identique, pour ce qui est des équipements enzymatiques, des processus nutritionnels, à quelques mutations près. Ce qui est propre à l’Homme tient à quelques particularités.
Il naît et reste longtemps immature. Il va devoir pendant des années dépendre de sa mère et de son père pour sa nourriture. Comme chez les Abeilles et les Fourmis, ce comportement va engendrer un système social développé.
C’est le moins spécialisé techniquement des Mammifères. C’est le plus omnivore des animaux. (…) 3) Enfin, le comportement alimentaire de l’homme est très curieusement réglé. L’eau et le sel mis à part, nous sommes presque totalement inconscients de nos besoins nutritionnels. Nous ne nous mettons pas à table pour refaire des réserves épuisées ; il nous suffirait alors de manger toutes les trois semaines pour l’homme, et toutes les six semaines pour la femme. Nous nous mettons à table et nous choisissons nos aliments, poussés par des motivations psycho-sensorielles et symboliques qui ne sont reliées aux motivations biochimiques que par tout ce que nous sommes.
D’après ce texte peut-on dire qu’en matière d’alimentation l’Homme soit un mammifère comme les autres ? ou En quoi, dans le monde du vivant, la nutrition humaine est-elle spécifique ?
Texte 2 : Les goûts alimentaires , Bulletin d’information du ministère de l’Agriculture, octobre 1985.
Observez avec précision la construction du texte. Et dégagez, reformulez l’idée développée dans chaque paragraphe
Comment les individus appartenant à une classe ou un groupe apprennent-ils et intériorisent-ils les goûts caractéristiques de leur classe ? Et comment expliquer que tous les individus d’une même classe n’aient pas les mêmes goûts ? Il n’y a pas une réponse, mais des réponses relevant du biologique, du psychologique et du social.
Certains goûts semblent universels et communs à chaque individu : attirance innée pour la saveur sucrée et dégoût, également inné, pour la saveur amère.
Dans la prime en France, les goûts alimentaires ne sont guère différents d’une classe sociale à l’autre. Il semble bien exister un «goût enfantin ». Puis, à partir de 2-3 ans, l’enfant refuse tout aliment étranger à son répertoire alimentaire familier : il apprend à choisir, c’est-à-dire à réduire le risque au minimum. À tel point qu’on peut se demander comment ses goûts vont se socialiser. Le plus souvent, ce sera sous l’influence de ses pairs et bien moins sous celle de ses parents.
Cependant, les goûts varient d’une classe sociale à l’autre. La bourgeoisie traditionnelle recherche les calories chères et dépense beaucoup pour l’alimentation ; en revanche, les classes aisées d’après-guerre se soucient davantage d’équilibre nutritionnel et consacrent moins de temps à l’alimentation. Les classes populaires préfèrent souvent des aliments « nourrissants », c’est-à-dire très énergétiques et peu coûteux.
Toutefois, l’évolution de l’organisation du travail modifie ces besoins : la force physique n’est presque plus utile et la reconstitution des forces de travail n’a plus lieu d’être. D’où une baisse d’intérêt de l’ouvrier (jeune) pour la nourriture, d’autant que son temps libre peut être utilisé pour d’autres activités. Le voilà prêt pour le fast-food.
Enfin, le « look » indispensable (mince, jeune et sportif) influe sur les préférences pour les produits diététiques.
Le choix des nutriments répond donc bien à des besoins nutritionnels et aux goûts individuels mais il est encore nettement déterminé par la situation sociale.
Texte 3 : Détermination de l’habitus alimentaire , Pierre Bourdieu, La Distinction, 1979.
Le goût en matière alimentaire dépend aussi de l’idée que chaque classe se fait du corps et des effets de la nourriture sur le corps, c'est-à-dire sur sa force, sa santé et sa beauté, et des catégories qu'elle emploie pour évaluer ces effets, certains d'entre eux pouvant être retenus par une classe qui sont ignorés par une autre, et les différentes classes pouvant établir des hiérarchies très différentes entre les différents effets : c'est ainsi que là où les classes populaires, plus attentives à la force du corps (masculin) qu’à sa forme, tendent à rechercher des produits à la fois bon marché et nourrissants, les professions libérales donneront leur préférence à des produits savoureux, bons pour la santé, légers et ne faisant pas grossir. Culture devenue nature, c'est-à-dire incorporée, classe faite corps, le goût contribue à faire le corps de classe : principe de classe- ment incorporé qui commande toutes les formes d'incorporation, il choisit et modifie tout ce que le corps ingère, digère, assimile, physiologiquement et psychologiquement. Il s'ensuit que le corps est l'objectivation la plus irrécusable du goût de classe, qu'il manifeste de plusieurs façons. // D'abord dans ce qu’il a de plus naturel en apparence, c'est-à-dire dans les dimensions (volume, taille, poids, etc.) et les formes (rondes ou carrées, raides ou souples, droites ou courbes, etc ) de sa conformation visible, où s'exprime de mille façons tout un rapport au corps, c'est-à-dire une manière de traiter le corps, de le soigner, de le nourrir, de l'entretenir, qui est révélatrice des dispositions les plus profondes de l'habitus : c'est en effet au travers des préférences en matière de consommation alimentaire qui peuvent se perpétuer au-delà de leurs conditions sociales de production (comme dans d’autres domaines un accent, une démarche, etc.), et aussi bien sûr au travers des usages du corps dans le travail et dans le loisir qui en sont solidaires, que se détermine la distribution entre les classes de propriétés corporelles.
Réfléchissez à la portée du titre.
Qu’apporte ce texte par rapport aux précédents ?
Bilan
attention à la portée du titre
lecture en écho
lecture pas à pas des paragraphes(structure – précision – reformulation – citation et commentaire- …)
DOCUMENTS COMPLEMENTAIRES : : En quoi la nutrition de l’homme est-elle liée à sa culture ?
Le bifteck et les frites, Roland Barthes, Mythologies, Éditions du Seuil, coll. « Points », 1951.
Le bifteck participe à la même mythologie sanguine que le vin. C'est le cœur de la viande, c'est la viande à l'état pur, et quiconque en prend, s'assimile la force taurine. De toute évidence, le prestige du bifteck tient à sa quasi-crudité : le sang y est visible, naturel, dense, compact et sécable à la fois ; on imagine bien l'ambroisie antique sous cette espèce de matière lourde qui diminue sous la dent de façon à bien faire sentir dans le même temps sa force d'origine et sa plasticité à s’épancher dans le sang même de l'homme. Le sanguin est la raison d'être du bifteck : les degrés de sa cuisson sont exprimés, non pas en unités caloriques, mais en images de sang; le bifteck est saignant (rappelant alors le flot artériel de l'animal égorgé), ou bleu (c'est le sang lourd, le sang pléthorique des veines qui est ici suggéré par le violine, état superlatif du rouge). La cuisson, même modérée, ne peut s'exprimer franchement; à cet état contre nature, il faut un euphémisme : on dit que le bifteck est à point, ce qui est à vrai dire donné plus comme une limite que comme une perfection.
Manger le bifteck saignant représente donc à la fois une nature et une morale. Tous les tempéraments sont censés y trouver leur compte, les sanguins par identité, les nerveux et les lymphatiques par complément. Et de même que le vin devient pour bon nombre d'intellectuels une substance médiumnique qui les conduit vers la force originelle de la nature, de même le bifteck est pour eux un aliment de rachat, grâce auquel ils prosaïsent leur cérébralité et conjurent par le sang et la pulpe molle la sécheresse stérile dont sans cesse on les accuse. La vogue du steak tartare, par exemple, est une opération d'exorcisme contre l'association romantique de la sensibilité et de la maladivité : il y a dans cette préparation tous les états germinants de la matière: la purée sanguine et le glaireux de l'œuf, tout un concert de substances molles et vives, une sorte de compendium significatif des images de la préparturition.
Comme le vin, le bifteck est, en France, élément de base, nationalisé plus encore que socialisé; il figure dans tous les décors de la vie alimentaire : plat, bordé de jaune, semelloïde, dans les restaurants bon marché; épais, juteux, dans les bistrots spécialisés; cubique, le cœur tout humecté sous une légère croûte carbonisée, dans la haute cuisine; il participe à tous les rythmes, au confortable repas bourgeois et au casse- croûte bohème du célibataire; c'est la nourriture à la fois expéditive et dense; il accomplit le meilleur rapport possible entre l'économie et l'efficacité, la mythologie et la plasticité de sa consommation.
De plus, c'est un bien français (circonscrit, il est vrai, aujourd'hui par l'invasion des steaks américains). Comme pour le vin, pas de contrainte alimentaire qui ne fasse rêver le Français de bifteck. À peine à l'étranger, la nostalgie s'en déclare, le bifteck est ici paré d'une vertu supplémentaire d'élégance, car dans la complication apparente des cuisines exotiques, c'est une nourriture qui joint, pense-t-on, la succulence à la simplicité. National, il suit la cote des valeurs patriotiques : il les renfloue en temps de guerre, il est la chair même du combattant français, le bien inaliénable qui ne peut passer à l'ennemi que par trahison. Dans un film ancien (Deuxième Bureau contre Kommandantur), la bonne du curé patriote offre à manger à l'espion boche déguisé en clan- destin français : « Ah, c'est vous, Laurent ! Je vais vous donner de mon bifteck. » Et puis, quand l'espion est démasqué: « Et moi qui lui ai donné de mon bifteck ! » Suprême abus de confiance.
La gourmandise
La gourmandise, souvent perçue comme un péché, est en réalité une célébration des plaisirs simples de la vie. Elle traduit un amour sincère pour les saveurs, les textures, et les expériences culinaires qui éveillent les sens. Plus qu'une simple quête de satiété, la gourmandise est un désir de savourer pleinement chaque bouchée, de découvrir de nouvelles sensations et de s'abandonner au bonheur que procure un mets bien préparé. C'est une passion qui rapproche les gens autour de la table, un partage d'émotions et de souvenirs qui transcende le quotidien pour en faire un moment de pure délectation.
Problématique : La gourmandise : vice ou vertu ?
Ouverture de séance : https://youtu.be/8AI_lBRCMf8 ( Le chocolat)
Le melon, Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT, 1634 (extraits)
Quelle odeur sens-je en cette chambre ?
Quel doux parfum de musc et d’ambre
Me vient le cerveau réjouir
Et tout le coeur épanouir ?
Ha ! bon Dieu ! j’en tombe en extase :
Ces belles fleurs qui, dans ce vase,
Parent le haut de ce buffet,
Feraient-elles bien cet effet ?
A-t-on brûlé de la pastille ?
N’est-ce point ce vin qui pétille
Dans le cristal, que l’art humain
A fait pour couronner la main
Et d’où sort, quand on en veut boire,
Un air de framboise à la gloire
Du bon terroir qui l’a porté
Pour notre éternelle santé ?
Non, ce n’est rien d’entre ces choses,
Mon penser, que tu me proposes.
Qu’est-ce donc ? je l’ai découvert
Dans ce panier rempli de vert :
C’est un MELON, où la nature,
Par une admirable structure,
A voulu graver à l’entour
Mille plaisants chiffres d’amour,
Pour claire marque à tout le monde
Que, d’une amitié sans seconde,
Elle chérit ce doux manger
Et que, d’un souci ménager,
Travaillant aux biens de la terre,
Dans ce beau fruit seul elle enserre
Toutes les aimables vertus
Dont les autres sont revêtus.
… Ha ! Soutenez-moi, je me pâme,
Ce morceau me chatouille l’âme ;
Il rend une douce liqueur
Qui me va confire le coeur ;
Mon appétit se rassasie
De pure et nouvelle ambroisie,
Et mes sens, par le goût séduits,
Au nombre d’un sont tous réduits.
Non, le cocos, fruit délectable
Qui lui tout seul fournit la table
De tous les mets que le désir
Puisse imaginer et choisir,
Ni les baisers d’une maîtresse
Quand elle-même nous caresse,
Ni ce qu’on tire des roseaux
Que Crète nourrit dans ses eaux,
Ni le cher abricot que j’aime,
Ni la fraise avecque la crème,
Ni la manne qui vient du ciel,
Ni le pur aliment du miel,
Ni la poire de Tours sacrée,
Ni la verte figue sucrée,
Ni la prune au jus délicat,
Ni même le raisin muscat
(Parole pour moi bien étrange),
Ne sont qu’amertume et que fange
Au prix de ce MELON divin,
Honneur du climat angevin.
… Ô manger précieux ! Délices de la bouche !
Ô doux reptile herbu, rampant sur une couche !
Ô beaucoup mieux que l’or, chef-d’oeuvre d’Apollon !
Ô fleur de tous les fruits ! Ô ravissant MELON !
Les hommes de la Cour seront gens de parole,
Les b… de Rouen seront francs de vérole,
Sans vermine et sans gale on verra les pédants,
Les preneurs de pétun auront de belles dents,
Les femmes des badauds ne seront plus coquettes,
Les corps pleins de santé se plairont aux cliquettes,
Les amoureux transis ne seront plus jaloux,
Les paisibles bourgeois hanteront les filous,
Les meilleurs cabarets deviendront solitaires,
Les chantres du Pont-neuf diront de hauts mystères,
Les pauvres quinze-vingt vaudront trois cents Argus,
Les esprits doux du temps paraîtront fort aigus,
Maillet fera des vers aussi bien que Malherbe,
Je haïrai Faret, qui se rendra superbe,
Pour amasser des biens, avare je serai,
Pour devenir plus grand, mon coeur j’abaisserai.
Bref, Ô MELON succrin, pour t’accabler de gloire,
Des faveurs de Margot je perdrai la mémoire.
Avant que je t’oublie et que ton goût charmant
Soit biffé des cahiers du bon gros SAINT-AMANT.
Question :
Par quels moyens le poète traduit-il sa gourmandise ?
Publicité pour biscuits apéritifs Belin, 1978
3.Les mangeurs de ricotta de Vincenzo Campi, réalisé vers 1580.
Question : Les documents 2 et 3 offrent-ils la même vision de la gourmandise ? Justifiez.
4 «Hymne à la gourmandise» ,Emmanuelle Turquet
Si la gourmandise souffre encore d’une telle image, c’est qu’elle subit une triple confusion :
1/ La gourmandise, c’est quand on mange trop !
Pour Alphonse Daudet, «la gourmandise commence quand on n’a plus faim» : être gourmand équivaudrait ainsi à manger au-delà de ses besoins et de sa faim. La gourmandise est en effet souvent associée à une notion de quantité. Cette idée va de pair avec la conviction largement ancrée dans l’inconscient collectif que bien manger (au sens de manger sainement), cela veut forcément dire manger peu, voire se priver. Certaines recommandations diététiques sont encore malheureusement basées sur le principe d’aliments interdits dont il faut absolument limiter la consommation (versus des aliments qu’on pourrait soi-disant manger en quantités illimitées car ils ne feraient pas grossir et/ou seraient bons pour la santé). La gourmandise est diabolisée parce qu’elle serait nécessairement associée à la privation (pour contrebalancer les effets d’aliments caloriques) et de la culpabilité.
2/ La gourmandise, c’est faire preuve de gloutonnerie et d’égoïsme !
Parce qu’elle est souvent interprétée comme le fait de manger trop, la gourmandise fait peur ! La présence d’un glouton, de quelqu’un qui dévore la nourriture et se l’accapare vient réveiller notre angoisse archaïque d’être lésé, de ne pas en avoir assez. Celui qui mange trop est suspecté de manger plus que sa part et donc d’enfreindre les règles du partage en groupe, de transgresser les lois non écrites de la commensalité (le fait de manger ensemble). Le gourmand est teinté d’égoïsme et son comportement est jugé comme inconvenant voire inacceptable par la société.
3/ La gourmandise et les plaisirs coupables
Le plaisir est au cœur de la question de la gourmandise, et engendre une autre confusion si l’on se place du point de vue religieux. Parce que la gourmandise touche aux sens et donc potentiellement au voluptueux et au charnel, il y a en effet une sorte de puritanisme alimentaire qui consiste à penser que si ça donne du plaisir, c’est forcément mauvais ! La recherche excessive du plaisir, et donc la gourmandise, est dès lors perçue comme un vice voire une pathologie. La gourmandise se teinte alors de jugement et de condamnation morale. On en est encore là aujourd’hui quand on parle d’addiction au sucre par exemple, en faisant la confusion entre une appétence pour le sucré et une véritable addiction, c’est-à-dire une dépendance, un comportement qui repose sur une envie répétée et irrépressible, malgré la motivation et les efforts de la personne pour décrocher.
La gourmandise ou l’art de la modération
Heureusement, de plus en plus de voix se font entendre pour réhabiliter la gourmandise et le plaisir de déguster sereinement et sans culpabilité des aliments savoureux. C’est notamment le propos de l’éducation sensorielle et de l’alimentation intuitive qui visent à ré-apprendre à manger avec plaisir, à savourer et à s’écouter et à dire stop aux interdits. Car la gourmandise au final est intimement liée à la modération, à cet art délicat qui consiste à se faire plaisir en écoutant et en respectant sa faim, ne serait-ce que pour pouvoir renouveler les expériences gustatives satisfaisantes. Comme le dit si bien Brillat-Savarin, « ceux qui s’indigèrent ou qui s’enivrent ne savent ni boire ni manger. ». La vraie gourmandise est faite de modération, de tempérance voire d’une certaine forme de raffinement. C’est en cela que le gourmand rejoint le gourmet, la personne qui sait distinguer et apprécier la bonne cuisine.
Questions : A quels documents ce dernier texte fait-il écho ? Précisez quel document pour quelle idée.
TEXTES COMPLEMENTAIRES
Le pain, Francis Ponge ,- Le parti pris des choses (1942)
La surface du pain est merveilleuse d'abord à cause de cette impression quasi panoramique qu'elle donne : comme si l'on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes.
Ainsi donc une masse amorphe en train d'éructer fut glissée pour nous dans le four stellaire, où durcissant elle s'est façonnée en vallées, crêtes, ondulations, crevasses... Et tous ces plans dès lors si nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application couche ses feux, - sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente.
Ce lâche et froid sous-sol que l'on nomme la mie a son tissu pareil à celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des sœurs siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent : elles se détachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable...
Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins objet de respect que de consommation.
La gourmandise, Muriel Barbery
Si le pain se « suffit à lui-même », c’est parce qu’il est multiple, non pas en ses sortes particulières mais en son essence même car le pain est riche, le pain est plusieurs, le pain est microcosme. En lui s’incorpore une assourdissante diversité, comme un univers en miniature, qui dévoile ses ramifications tout au long de la dégustation. L’attaque, qui se heurte d’emblée aux murailles de la croute, s’ébahit, sitôt ce barrage surmonté, du consentement que lui donne la mie fraiche. Il y a un tel fossé entre l’écorce craquelée, parfois dure comme de la pierre, parfois juste parure qui cède très vite à l’offensive, et la tendresse de la substance interne qui se love dans les joues avec une docilité câline, que c’en est presque déconcertant. Les fissures de l’enveloppe sont autant d’infiltrations champêtres : on dirait un labour […]
A l’intersection de la croûte et de la mie, en revanche, c’est un moulin qui prend forme sous notre regard intérieur ; la poussière de blé vole autour de la meule, l’air est infesté de poudre volatile ; et de nouveau changement de tableau, parce que le palais vient d’épouser la mousse alvéolée libérée de son carcan et que le travail des mâchoires peut commencer.
Le café, Jacques Delille, 1738 - 1813
Il est une liqueur, au poëte plus chère,
Qui manquait à Virgile, et qu'adorait Voltaire ;
C'est toi, divin café, dont l'aimable liqueur
Sans altérer la tête épanouit le coeur.
Aussi, quand mon palais est émoussé par l'âge,
Avec plaisir encor je goûte ton breuvage.
Que j'aime à préparer ton nectar précieux !
Nul n'usurpe chez moi ce soin délicieux.
Sur le réchaud brûlant moi seul tournant ta graine,
A l'or de ta couleur fais succéder l'ébène ;
Moi seul contre la noix, qu'arment ses dents de fer,
Je fais, en le broyant, crier ton fruit amer,
Charmé de ton parfum, c'est moi seul qui dans l'onde
Infuse à mon foyer ta poussière féconde ;
Qui, tour à tour calmant, excitant tes bouillons,
Suis d'un oeil attentif tes légers tourbillons.
Enfin, de ta liqueur lentement reposée,
Dans le vase fumant la lie est déposée ;
Ma coupe, ton nectar, le miel américain,
Que du suc des roseaux exprima l'Africain,
Tout est prêt : du Japon l'émail reçoit tes ondes,
Et seul tu réunis les tributs des deux mondes.
Viens donc, divin nectar, viens donc, inspire-moi.
Je ne veux qu'un désert, mon Antigone et toi.
A peine j'ai senti ta vapeur odorante,
Soudain de ton climat la chaleur pénétrante
Réveille tous mes sens ; sans trouble, sans chaos,
Mes pensers plus nombreux accourent à grands flots.
Mon idée était triste, aride, dépouillée ;
Elle rit, elle sort richement habillée,
Et je crois, du génie éprouvant le réveil,
Boire dans chaque goutte un rayon du soleil.
D) Publicité Findus
Sujet d’essai : En quoi la société de consommation alimente-t-elle la gourmandise ?
Nourriture et Histoire : L’évolution historique des pratiques alimentaires
L'évolution des pratiques alimentaires est intimement liée à l'histoire de l'humanité, reflétant les transformations économiques, sociales, et culturelles au fil des siècles. Des premières sociétés agricoles aux révolutions industrielles, chaque époque a marqué un tournant dans la manière de produire, préparer et consommer la nourriture. Les échanges commerciaux ont introduit de nouveaux aliments, tandis que les découvertes géographiques ont enrichi les cuisines du monde. Les pratiques alimentaires ont également évolué sous l'influence des migrations, des guerres, et des innovations technologiques. Ainsi, la nourriture est bien plus qu'un besoin vital : elle est le témoin de l'histoire, une trace vivante des civilisations et de leurs évolutions.
De la cueillette à l’agriculture: L’évolution des modes de production alimentaire a profondément modifié les pratiques alimentaires et les relations sociales.
Les grandes civilisations: Les repas étaient souvent des occasions de manifester le pouvoir et le prestige des élites.
L’industrialisation de l’alimentation: La révolution industrielle a bouleversé les modes de production et de consommation alimentaire, avec l’apparition de l’alimentation industrielle et de la restauration rapide.
1)A table ! Cuisiner il y a 8000 ans (youtube.com)
2)À la table des paysans et des seigneurs - « Tranches de vie au Moyen Âge » - Jeux éducatifs et interactifs pour web et tablettes – Cité des sciences et de l’industrie (cite-sciences.fr)
3)Comment mange-t-on aujourd’hui ?
«Les mutations de l’alimentation», Les évolutions de l’alimentation et de sa sociologie au regard des inégalites sociales, Thibaut de Saint Pol dans L'Année sociologique, 2017.
Depuis les années 1980, de nombreuses études ont interrogé la transformation des repas en Europe autour du « leitmotiv de la modernité alimentaire » (Aymard et al., 1993), à savoir la thèse de la crise des repas traditionnels et de leur « déstructuration » (Herpin, 1988), qui toucherait en particulier les plus défavorisés. Le modèle alimentaire traditionnel apparaissait en voie de disparition, notamment du fait de l’augmentation de l’alimentation hors-repas (Fischler, 1979).
Si l’alimentation ne joue plus le même rôle qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et si « une dévaluation progressive des pratiques alimentaires » a eu lieu au cours des années 1980 (Pynson, 1987), plusieurs études témoignent du maintien de la grille des repas quotidiens en France (Grignon, 1998 ; Tavoularis, Mathé, 2010 ; Lhuissier et al., 2013), mais aussi dans des pays voisins (Mestdag, 2005). Ainsi, les enquêtes « Emploi du temps » réalisées par l’Insee font apparaître une forte synchronisation des pratiques alimentaires des Français autour de trois pics quotidiens (Larmet, 2002 ; de Saint Pol, 2007). Malgré les facilités croissantes pour s’alimenter à toute heure, le quotidien des Français reste rythmé par les trois repas traditionnels, pris massivement aux mêmes plages horaires (Riou et al., 2015). Ainsi, à 13h, la moitié des Français est en train de déjeuner. Ce modèle persistant est très éloigné de celui des États-Unis par exemple, où les habitants sont bien moins nombreux à manger aux mêmes heures (de Saint Pol, Ricroch, 2012).
Le rituel des trois repas est malgré tout moins respecté désormais par les jeunes, qui sont les moins nombreux à prendre notamment un petit-déjeuner. En outre, l’alimentation hors-repas se développe : un tiers des Français déclare grignoter à d’autres moments que les repas. Les jeunes sont aussi les premiers concernés par ce phénomène : 41 % des 18-25 ans déclarent grignoter parfois et même 29 % très souvent, contre respectivement 20 % et 8 % parmi les plus de 60 ans (de Saint Pol, Ricroch, 2012). Les ouvriers et les employés sont par ailleurs les plus concernés par le grignotage : ils sont respective- ment 22 % et 20 % à déclarer grignoter très souvent contre 9 % parmi les cadres.
Les contraintes économiques, les mutations des rythmes de vie ou encore le développement des loisirs ont en effet transformé les comportements alimentaires au cours des dernières décennies : les Français consomment désormais moins de produits frais, davantage de plats préparés, se font plus souvent livrer leurs repas. Parallèlement, les établissements de restauration rapide se sont fortement développés, facilitant la prise de repas sur le pouce : c’est dans ce secteur des services marchands aux particuliers que le nombre d’établissements a le plus augmenté au cours des dix dernières années. Le temps quotidien moyen consacré à faire la cuisine s’est réduit de 18 minutes en France métropolitaine entre 1986 et 2010, passant de 1 heure et 11 minutes à 53 minutes. Mais le temps consacré à s’alimenter, lui, s’est plutôt accru : 2h. 22 par jour en moyenne en 2010, soit 13 minutes de plus qu’en 1986, ce qui fait de la France un cas à part parmi les pays occidentaux où le temps passé à manger a tendance à décroître depuis une vingtaine d’années (Warde et al., 2007).
La grande majorité des prises alimentaires a lieu en la présence d’autres personnes, qu’il s’agisse de membres de la famille, d’amis ou encore de collègues. Le repas est un temps d’échange, de rassemble- ment, qui participe à la construction de l’identité du groupe au travers de la commensalité (Fischler, 2011). Cette importance symbolique donnée en France au fait de manger ensemble apparaît aussi comme un facteur protecteur, contribuant notamment à limiter la prévalence de l’obésité et les pathologies liées à la nutrition.
Parallèlement à cet attachement à la commensalité, on observe également une plus forte revendication des particularismes alimentaires, pourtant jusqu’ici particulièrement mal perçus en France. Qu’il s’agisse par exemple de ne plus manger de viande, de lait ou de gluten, les « alimentations particulières » se développent avec des motivations croisant à la fois des préoccupations médicales, sanitaires, religieuses ou éthiques (Fischler, 2013). Les régimes en particulier font l’objet de modes alimentaires révélatrices de cette tendance à faire de l’alimentation une manière de revendiquer sa singularité, au croisement de conceptions morales et de préoccupations de santé.
DOCUMENT COMPLEMENTAIRE :
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/20/qu-est-ce-qu-on-mange-l-assiette-des-francais-decortiquee_5400180_3244.html
https://youtu.be/J1S88KoTLxc ( Soleil vert de Richard Fleischer (1972)quelle alimentation dans le futur ?) https://www.tokyvideo.com/fr/video/soleil-vert-vf
La cuisine comme expression identitaire
L'adage "Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es" illustre parfaitement le lien profond entre l'alimentation et l'identité, que ce soit au niveau individuel, régional ou national. Ce que nous choisissons de mettre dans nos assiettes révèle nos préférences personnelles, nos valeurs, et notre mode de vie. À une échelle plus large, les plats typiques d'une région ou d'une nation sont le reflet d'une histoire collective, de traditions culturelles, et des ressources naturelles disponibles. Ainsi, la nourriture devient un miroir de l'identité, révélant autant les caractéristiques d'un individu que celles de la communauté à laquelle il appartient.
Acte III, scène 5 L’avare, Molière, 1668
Harpagon
Valère, aide-moi à ceci. Oh çà, Maître Jacques, approchez-vous ; je vous ai gardé pour le dernier.
Maître Jacques
Est-ce à votre cocher, Monsieur, ou bien à votre cuisinier, que vous voulez parler ? car je suis l'un et l'autre.
Harpagon
C'est à tous les deux.
Maître Jacques
Mais à qui des deux le premier ?
Harpagon
Au cuisinier.
Maître Jacques
Attendez donc, s'il vous plaît.
(Maître Jacques ôte sa casaque de cocher, et paraît vêtu en cuisinier.)
Harpagon
Quelle diantre de cérémonie est-ce là ?
Maître Jacques
Vous n'avez qu'à parler.
Harpagon
Je me suis engagé, Maître Jacques : , à donner ce soir à souper.
Maître Jacques (à part.)
Grande merveille !
Harpagon
Dis-moi un peu nous feras-tu bonne chère ?
Maître Jacques
Oui, Si vous me donnez bien de l'argent.
Harpagon
Que diable, toujours de l'argent ! Il semble qu'ils n'aient autre chose à dire De l'argent, de l'argent, de l'argent ! Ah ! ils n'ont que ce mot à la bouche, de l'argent ! toujours parler d'argent ! Voilà leur épée de chevet (12)
, de l'argent !
Valère
Je n'ai jamais vu de réponse plus impertinente que celle-là. Voilà une belle merveille que de faire bonne chère avec bien de l'argent ! C'est une chose la plus aisée du monde, et il n'y a si pauvre esprit qui n'en fît bien autant ; mais, pour agir en habile homme, il faut parler de faire bonne chère avec peu d'argent.
Maître Jacques
Bonne chère avec peu d'argent !
Valère
Oui.
Maître Jacques (à Valère)
Par ma foi, Monsieur l'intendant, vous nous obligerez de nous faire voir ce secret, et de prendre mon office de cuisinier ; aussi bien vous mêlez-vous céans d'être le factotum.
Harpagon
Taisez-vous. Qu'est-ce qu'il nous faudra ?
Maître Jacques
Voilà monsieur votre intendant qui vous fera bonne chère pour peu d'argent.
Harpagon
Haye ! Je veux que tu me répondes.
Maître Jacques
Combien serez-vous de gens à table ?
Harpagon
Nous serons huit ou dix ; mais il ne faut prendre que huit quand il y a à manger pour huit, il y en a bien pour dix.
Valère
Cela s'entend.
Maître Jacques
Eh bien ! il faudra quatre grands potages et cinq assiettes… Potages… Entrées.
Harpagon
Que diable ! voilà pour traiter toute une ville entière.
Maître Jacques
Rôt…
Harpagon (mettant la main sur la bouche de Maître Jacques)
Ah ! traître, tu manges tout mon bien.
Maître Jacques
Entremets…
Harpagon (mettant encore la main sur la bouche de Maître Jacques)
Encore ?
Valère (à Maître Jacques)
Est-ce que vous avez envie de faire crever tout le monde ? et Monsieur a-t-il invité des gens pour les assassiner à force de mangeaille ? Allez-vous-en lire un peu les préceptes de la santé, et demander aux médecins s'il y a rien de plus préjudiciable à l'homme que de manger avec excès.
Harpagon
Il a raison.
Valère
Apprenez, Maître Jacques, vous et vos pareils, que c'est un coupe-gorge qu'une table remplie de trop de viandes ; que pour se bien montrer ami de ceux que l'on invite, il faut que la frugalité règne dans les repas qu'on donne ; et que, suivant le dire d'un ancien, il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger.
Harpagon
Ah ! que cela est bien dit ! Approche, que je t'embrasse pour ce mot. Voilà la plus belle sentence que j'aie entendue de ma vie Il faut vivre pour manger, et non pas manger pour vi… Non, ce n'est pas cela. Comment est-ce que tu dis ?
Valère
Qu'il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger.
Harpagon (à Maître Jacques)
Oui. Entends-tu ? (À Valère.)
Qui est le grand homme qui a dit cela ?
Valère
Je ne me souviens pas maintenant de son nom.
Harpagon
Souviens-toi de m'écrire ces mots : je les veux faire graver en lettres d'or sur la cheminée de ma salle.
Valère
Je n'y manquerai pas. Et, pour votre souper, vous n'avez qu'à me laisser faire : je réglerai tout cela comme il faut.
Harpagon
Fais donc.
Maître Jacques
Tant mieux ! j'en aurai moins de peine.
Harpagon (à Valère)
Il faudra de ces choses dont on ne mange guère, et qui rassasient d'abord quelque bon haricot bien gras, avec quelque pâté en pot bien garni de marrons.
Valère
Reposez-vous sur moi.
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La nourriture vue par… la psychologie, par Justine_, 2017 in Madmoizelle
Comment se forment nos goûts alimentaires ?
Vous avez déjà remarqué comme les repas diffèrent d’une famille à l’autre ? Avez-vous déjà été effaré•es par les choix alimentaires de votre partenaire ou de vos potes ?Je ne veux pas balancer, mais de mon côté, j’ai connu quelqu’un qui mettait du ketchup dans des pâtes à la carbonara (DU KETCHUP !).
Nos goûts se forment de façon très complexe, et sur ce point précis, nous sommes toutes et tous très différent•es.À la naissance, la plupart d’entre nous ont des comportements adaptés à notre corps. Les nourrissons consomment ce dont ils ont besoin et, a priori, ils ajustent leurs prises alimentaires à leurs sensations de faim et de satiété.Cette histoire de sensations est essentielle : cela pourrait couler de source, mais une bonne partie des adultes a des difficultés à « écouter » ces sensations !
Ensuite, dans la petite enfance, autour de deux ans, les enfants savent reconnaître les aliments « nourrissants », ceux qui calmeront leur sensation de faim immédiatement.Ce serait pour cette raison que les bambins préfèreraient les féculents (d’autant plus s’ils sont gras) à des choses moins nourrissantes (je vous le donne en mille : les légumes).Ainsi, jusqu’à l’adolescence, nous aurions une tendance générale à bien kiffer le gras, le sucré, le doux… puis, progressivement, nous adoptons de nouvelles choses, les légumes commencent à être appréciés (mais bon, moins que le reste, quoi).
Ces premiers constats sont des tendances générales, qui reposent sur des statistiques, mais en fait, tous les gens sont très différents face à la nourriture.Pour les aliments, c’est la même histoire : nous avons tous et toutes des sensations différentes, parce que nos « cellules » olfactives et gustatives sont différentes.Du coup, nous ne percevons pas les aliments de la même manière, nous avons des sensibilités différentes.Pour certain•es, l’odeur du chou-fleur est insurmontable, pour d’autres, elle n’est pas si forte que ça.Cette première observation explique les choses de façon « physiologique », « biologique », mais notre goût est influencé par bien d’autres facteurs : par notre entourage, notre culture, l’endroit où l’on vit, notre psychisme…
La néophobie : la crainte de goûter
Selon un article de Gérard Apfeldorfer, les ¾ des enfants entre 2 et 10 ans refuseraient catégoriquement de goûter des aliments qu’ils ne connaissent pas.Je ne sais pas comment ça se passe pour vous, mais moi, du haut de ma presque trentaine, je suis toujours très peu enchantée à l’idée de goûter un nouvel aliment (on sait jamais, des fois qu’il m’empoisonne).
En fait, ce phénomène a un nom et toucherait un paquet de monde : c’est la « néophobie », la peur d’avaler un aliment inconnu, de flanquer à l’intérieur de nos corps un truc qu’on ne connaît pas.Pourquoi ? Parce qu’on ne connaît pas son goût, parce qu’on craint de ne pas aimer, parce qu’il nous dégoûte, parce qu’il pourrait ne pas être « bon » pour nous (et donc nous empoisonner)…La néophobie est surtout présente chez les enfants, mais pas seulement.
Pour dépasser cette crainte, les psychologues conseillent de passer par la « familiarisation » : augmenter le nombre de contacts entre l’enfant (ou l’ado, ou l’adulte) et l’aliment maudit avant de le présenter dans l’assiette.Ensuite, Gérard Apfeldorfer souligne que plus on consomme un produit, plus le plaisir pour ce produit augmente (c’est « l’effet positif de l’exposition »).
La psychologue Leann Birch a étudié le lien entre le contexte affectif et l’appréciation de la nourriture : elle a observé des enfants âgés de 3 à 5 ans chaque jour, pendant six semaines, et a constaté que les aliments mangés dans un contexte chaleureux, ou présentés comme des récompenses, étaient significativement plus appréciés que les autres.Autrement dit, la présence de notre entourage, ou la manière de présenter les aliments, pourraient favoriser le développement d’un lien affectif avec la nourriture (et pourrait donc nous filer un coup de pouce pour l’apprécier).[…]
La nourriture émotionnelle
Nous avons causé biologie, développement du goût, nous avons dit que ce que l’on mange pouvait avoir une origine et une portée sociale.Figurez-vous que la nourriture peut également être influencée par ce qu’il se passe dans nos têtes : par la psychologie ! Pour le professeur de psychologie Michael Macht, l’acte de manger et l’équilibre émotionnel seraient étroitement liés.
Les émotions auraient un rôle dans nos comportements alimentaires. Parfois, nous mangeons pour nous « remplir », pour nous réconforter, pour diminuer notre stress, pour célébrer une heureuse nouvelle…Selon plusieurs études, nous mangerions de plus grandes quantités dans les situations de crise. Par exemple, les étudiantes et étudiants mangeraient davantage avant leurs examens, sans avoir de troubles alimentaires spécifiques.
Manger plus pour diminuer des émotions négatives serait un comportement « commun ».
Lors d’une expérience, des chercheur•ses ont montré à des volontaires une vidéo dans laquelle un garçon apprend le décès de son père.Après cette diffusion, les spectateurs sont attristés… mais ils se sentent mieux si on leur donne un morceau de chocolat (à condition qu’ils jugent le chocolat spécialement bon : je veux dire, si votre truc, c’est les Kinder Bueno et qu’un chercheur vous file un morceau de saucisson, l’effet ne va pas fonctionner).En fait, le plaisir immédiat et l’émotion suscitée par le morceau de chocolat vont apaiser la tristesse.Pour certaines personnes, ce mécanisme peut être trop souvent utilisé, et devenir une source d’inquiétude ; les thérapeutes conseillent dans ce cas d’essayer de réguler ses émotions par ses propres moyens, sans utiliser la nourriture, et de tenter de manger « en pleine conscience ».
En fin de compte, ce qu’il est essentiel de retenir, c’est que la nourriture, est un sujet particulièrement complexe, qui touche à peu près tous les aspects de nos vies : nos identités, nos cultures, nos relations, nos sociétés, notre santé…
Lorsque l’on parle de cuisine, il est rare que l’on parle essentiellement de se nourrir !Lorsque vous pensez à la sauce tomate de votre mère, ou aux pancakes de l’un de vos proches, il est possible que vous pensiez en même temps à des moments que vous avez vécu ensemble, à vos origines, à vos sensations…
Question : Quels liens peut-on tisser entre alimentation et individu ?
La cuisine comme identité territoriale
La cuisine est un reflet puissant de l'identité territoriale, incarnant l'histoire, le climat, et les ressources d'une région. Chaque plat traditionnel raconte une histoire unique, ancrée dans le terroir et les pratiques culturelles locales. Les ingrédients utilisés, souvent spécifiques à une zone géographique, ainsi que les méthodes de préparation, révèlent un savoir-faire transmis de génération en génération. Ainsi, la cuisine devient un marqueur identitaire, permettant à une communauté de se reconnaître et de se distinguer, tout en partageant avec le monde l'essence même de son territoire.Objectif : s’approprier une référence par l’écriture créative.
Alphonse Daudet, Contes du lundi, 1873. PAYSAGES GASTRONOMIQUES
LA BOUILLABAISSE
Nous longions les côtes de Sardaigne, vers l'île de la Madeleine. Une promenade matinale. Les rameurs allaient lentement, et penché sur le bord je voyais la mer, transparente comme une source, traversée de soleil jusqu'au fond. Des méduses, des étoiles de mer s'étalaient parmi les mousses marines. De grosses langoustes donnaient immobiles en abaissant leurs longues cornes sur le sable fin. Tout cela vu à dix-huit ou vingt pieds de profondeur, dans je ne sais quelle facticité d'aquarium en cristal. A l'avant de la barque, un pêcheur debout, un long roseau fendu à la main, faisait signe aux rameurs: «piano... piano...» et tout à coup, entre les pointes de sa fourche, tenait suspendue une belle langouste qui allongeait ses pattes avec un effroi encore plein de sommeil. Près de moi, un autre marin laissait tomber sa ligne à fleur d'eau dans le sillage et ramenait des petits poissons merveilleux qui se coloraient en mourant de mille nuances vives et changeantes. Une agonie vue à travers un prisme. La pêche finie, on aborda parmi les hautes roches grises. Le feu fut vite allumé, pâle dans le grand soleil; de larges tranches de pain coupées sur de petites assiettes de terre rouge, et l'on était là autour de la marmite, l'assiette tendue, la narine ouverte... Était-ce le paysage, la lumière, cet horizon de ciel et d'eau? Mais je n'ai jamais rien mangé de meilleur que cette bouillabaisse de langoustes. Et quelle bonne sieste ensuite sur le sable! un sommeil tout plein du bercement de la mer, où les mille écailles luisantes des petites vagues papillotaient encore aux yeux fermés.
L' AIOLI
On se serait cru dans la cabane d'un pêcheur de Théocrite, au bord de la mer de Sicile. C'était simplement en Provence, dans l'île de Camargue, chez un garde-pêche. Une cabane de roseaux, des filets pendus au mur, des rames, des fusils, quelque chose comme l'attirail d'un trappeur, d'un chasseur de terre et d'eau. Devant la porte, encadrant un grand paysage de plaine, agrandi encore par le vent, la femme du garde dépouillait de belles anguilles toutes vives. Les poissons se tordaient au soleil; et là-bas, dans la lumière blanche des coups de vent, des arbres grêles se courbaient, avaient l'air de fuir, montrant le côté pâle de leurs feuilles. Des marécages luisaient de place en place entre les roseaux, comme les fragments d'un miroir brisé. Plus loin encore, une grande ligne étincelante fermait l'horizon; c'était l'étang de Vaccarès. Dans l'intérieur de la cabane où brillait un feu de sarments tout en pétillement et en clarté, le garde pilait religieusement les gousses d'ail dans un mortier en y laissant tomber l'huile d'olive goutte à goutte. Nous avons mangé l'aioli autour de nos anguilles, assis sur de hauts escabeaux devant la petite table de bois, dans cette étroite cabane où la plus grande place était tenue par l'échelle montant à la soupente. Autour de la chambre si petite on devinait un horizon immense traversé de coups de vent, de vols hâtés d'oiseaux en voyage; et l'espace environnant pouvait se mesurer aux sonnailles des troupeaux de chevaux et de bœufs, tantôt retentissantes et sonores, tantôt diminuées dans l'éloignement et n'arrivant plus que comme des notes perdues, enlevées dans un coup de mistral. LE
KOUSSKOUSS
C'était en Algérie, chez un aga de la plaine du Chélif. De la grande tente seigneuriale installée pour nous devant la maison de l'aga, nous voyions descendre une nuit de demi-deuil, d'un noir violet où se fonçait la pourpre d'un couchant magnifique; dans la fraîcheur de la soirée, au milieu de la tente entr'ouverte, un chandelier kabyle en bois de palmier levait au bout de ses branches une flamme immobile qui attirait des insectes de nuit, des frôlements d'ailes peureuses. Accroupis tout autour sur des nattes, nous mangions silencieusement: c'étaient des moutons entiers, tout ruisselants de beurre, qu'on apportait au bout d'une perche, des pâtisseries au miel, des confitures musquées, et enfin un grand plat de bois où des poulets s'étalaient dans la semoule dorée du kousskouss. Pendant ce temps-là, la nuit était venue. Sur les collines environnantes, la lune se levait, un petit croissant oriental où s'enfermait une étoile. Un grand feu flambait en plein air devant la tente, entouré de danseurs et de musiciens. Je me souviens d'un nègre gigantesque, tout nu sous une ancienne tunique des régiments de léger, qui bondissait en faisant courir des ombres sur toute la toile... Cette danse de cannibale, ces petits tambours arabes haletant sous la mesure précipitée, les aboiements aigus des chacals qui se répondaient de tous les coins de la plaine; on se sentait en plein pays sauvage. Cependant à l'intérieur de la tente,— cet abri des tribus nomades qui ressemble à une voile fixe sur un élément immobile,—l'aga dans ses bournous de laine blanche me semblait une apparition des temps primitifs, et pendant qu'il mangeait son kousskouss gravement, je pensais que le plat national arabe pourrait bien être cette manne miraculeuse des Hébreux dont il est parlé dans la Bible.
LA POLENTA
La côte Corse, un soir de novembre.—Nous abordons sous la grande pluie dans un pays complètement désert. Des charbonniers Lucquois nous font une place à leur feu; puis un berger indigène, une espèce de sauvage tout habillé de peau de bouc, nous invite à venir manger la polenta dans sa cabane. Nous entrons, courbés, rapetissés, dans une hutte où l'on ne peut se tenir debout. Au milieu, des brins de bois vert s'allument entre quatre pierres noires. La fumée qui s'échappe de là monte vers le trou percé à la hutte, puis se répand partout, rabattue par la pluie et le vent. Une petite lampe—le caleil provençal—ouvre un œil timide dans cet air étouffé. Une femme, des enfants apparaissent de temps en temps quand la fumée s'éclaircit, et tout au fond un porc grogne. On distingue des débris de naufrage, un banc fait de morceaux de navires, une caisse de bois avec des lettres de roulage, une tête de sirène en bois peint arrachée à quelque proue, toute lavée d'eau de mer. La polenta est affreuse. Les châtaignes mal écrasées ont un goût moisi; on dirait qu'elles ont séjourné longtemps sous les arbres, en pleine pluie. Le bruccio national vient après, avec son goût sauvage qui fait rêver de chèvres vagabondes ... Nous sommes ici en pleine misère italienne. Pas de maison, l'abri. Le climat est si beau, la vie si facile! Rien qu'une niche pour les jours de grande pluie. Et alors qu'importe la fumée, la lampe mourante, puisqu'il est convenu que le toit c'est la prison et qu'on ne vit bien qu'en plein soleil?
Ecriture: Après lecture de ce texte pouvez-vous en expliquer le titre Paysages gastronomiques ? À votre tour décrivez un paysage gastronomique.
2.L’Homnivore, de Claude Fischler, ÉD. Odile Jacob (nouvelle édition 2001). Les Alimentations particulières : Mangerons-nous encore ensemble demain ?, collectif, Odile Jacob, 2013.
Certains plats, dans certaines régions, charrient l’histoire, les peuplements, les conquêtes, les influences culturelles ou religieuses, concentrent le temps et l’espace. La caponata sicilienne est de ceux-là. Je l’ai découverte il y a une vingtaine d’années à l’occasion d’une enquête sur l’huile d’olive en Sicile, une grande île qui m’a fasciné. Partout où j’allais, on me proposait de la caponata, mais partout quelque chose variait. Les préparations, mais aussi les usages, la place dans la syntaxe du repas et l’ordre des mets. L’ingrédient fondamental, celui qui ne change pas, c’est l’aubergine ; le trait gustatif essentiel, c’est l’agrodolce, ou aigre-doux, qui renvoie à la fois aux survivances médiévales et aux influences arabes. À Raguse, on me la présentait sur du pain. À Syracuse, elle contenait des raisins secs et était servie en entrée. Ailleurs, il y avait des poivrons, à moins qu’elle n’accompagne de l’espadon. Ce n’était jamais la même recette, mais toujours “la vraie”, “la meilleure”, “l’authentique”. La Sicile est un nœud de cultures inextricable au point qu’on nomme son architecture arabo-normande ou normando-arabo-byzantine… La caponata en est la cristallisation comestible et savoureuse. »
Quand l’alimentation devient un problème.
Quand l'alimentation devient un problème, elle cesse d'être une source de plaisir et de bien-être pour devenir une source d'anxiété et de souffrance. Cela peut se manifester par des troubles du comportement alimentaire, comme l'anorexie, la boulimie ou l'hyperphagie, où la relation avec la nourriture devient dysfonctionnelle. D'autres fois, c'est une alimentation déséquilibrée ou mal adaptée qui conduit à des problèmes de santé, tels que l'obésité, le diabète ou des carences nutritionnelles. Par ailleurs, la famine demeure une réalité tragique pour des millions de personnes à travers le monde, exacerbée par des crises environnementales telles que le changement climatique, la déforestation et l'épuisement des ressources naturelles. Ces problématiques soulignent l'urgence de rétablir un rapport sain et durable avec la nourriture, tant au niveau individuel que global, pour préserver la santé humaine et celle de la planète.
The big Supper, Gérard Rancinan ,2009
Le photographe Gérard Rancinan a lui aussi fait sa version de La Cène dans le cadre de son exposition Métamorphoses qu’il a exposé au Palais de Tokyo à Paris en 2009 : The Big Supper . Cette photographie représentant un banquet ( avec de la nourriture en provenance d’un célèbre fast food américain ) d’obèses dénonce la malbouffe et la restauration rapide, préoccupation majeure de notre 21ème siècle.
La faim dans le monde, Philosophie magazine, Nicolas Tenaillon publié le 25 mai 2022
Que veut dire “avoir faim” ?
L’insécurité alimentaire ne cesse d’augmenter dans le monde. Avec la guerre en Ukraine et la décision de l’Inde de ne plus exporter de céréales, elle touche désormais près de 200 millions de personnes. La famine menace tout particulièrement l’Afrique, notamment l’Égypte et le Congo, et une partie du Moyen-Orient, qui importent massivement leurs céréales d’Ukraine et de Russie. Cette situation potentiellement tragique invite à réfléchir à ce que signifie « avoir faim ». Entre douleur de la privation subie, maladie psychique et jeûne volontaire, les philosophes nous aident à penser ce que cette inquiétude du corps peut signifier pour l’âme.
Descartes : une preuve de l’union de l’âme et du corps
René Descartes nous rappelle d’abord que la faim fait partie de ces expériences élémentaires qui prouvent que l’âme est intimement mêlée au corps : « La nature m’enseigne par ces sentiments de douleur, de faim, de soif, etc., que je ne suis pas seulement logé dans mon corps ainsi qu’un pilote dans son navire, mais, outre cela, que je lui suis conjoint très étroitement et tellement confondu et mêlé, que je compose comme un seul tout avec lui. » (Méditations métaphysiques, 1641). Si la faim n’est pas rassasiée, l’âme en est affectée douloureusement : la liqueur qui ne trouve pas dans l’estomac « les viandes à dissoudre emploie ses forces contre les peaux dont il est composé » (Lettre au marquis de Newcastle). Descartes voit ainsi que la faim peut dérégler le mécanisme du corps, le retourner contre lui-même. Mais il ne va pas jusqu’à dire que si le corps est trop affamé, l’âme ne peut plus penser. C’est qu’à ses yeux, l’âme peut maîtriser toutes les passions du corps. Du moins le croit-il, lui qui n’a jamais connu la faim, ses maîtres d’internat au collège jésuite de la Flèche lui ayant épargné les jeûnes de Carême parce qu’il était de santé fragile quand il était adolescent.
Marx : un moyen de contrôle du prolétariat
Mais lorsque l’on ne sait pas ce que l’on mangera demain, la faim devient pour l’âme, non plus seulement une hantise mais une question prioritaire, obsessionnelle. Ainsi lorsque Karl Marx écrit à son ami Friedrich Engels : « Depuis huit jours, je nourris la famille avec du pain et des pommes de terre, mais je me demande si je pourrai encore me les procurer aujourd’hui » (Lettre du 4 septembre 1852), et lorsqu’on sait que son fils Edgar mourra de sous-alimentation, on comprend mieux pourquoi le même Marx en appelle à résoudre ce que Robespierre appelait « l’éternel problème des subsistances » par une nouvelle révolution. Dénoncer le capitalisme revient pour Marx à critiquer un système qui entretient la faim afin d’exploiter le plus possible le prolétariat, et s’en sert comme d’une menace pour maintenir des salaires très bas. Faire advenir le communisme, ce sera au contraire donner à chacun de quoi manger décemment, sans crainte du lendemain. Le mérite de Marx est peut-être d’avoir perçu que le problème de la faim est moins naturel que culturel.
Vigarello : une obsession esthétique qui vire à la pathologie
Mais précisément, parce qu’elle est culturelle, la faim n’est pas forcément liée à la pauvreté. Car celui qui peut manger à sa guise, s’il ne se modère pas, dilate son estomac et éprouve de plus en plus… le sentiment de la faim. Tel est le cas du boulimique, qui finit par manger mécaniquement en s’imaginant, pour se justifier, qu’il a toujours faim. Quant à l’anorexique qui, lui, devrait éprouver un tel sentiment, il s’interdit paradoxalement de manger. Ces deux pathologies alimentaires, souvent interprétés comme symétriques, ne relèvent pas seulement de troubles psychologiques. Comme le montre l’historien Georges Vigarello dans Les Métamorphoses du gras. Histoire de l’obésité (Seuil, 2013), la pression des normes sociales relatives à l’apparence du corps, en particulier en Occident à partir de la fin du XIXe siècle avec l’émergence de l’entretien par le sport, les pratiques balnéaires, le début du marché de l’amincissement, etc., ont généré des attitudes alimentaires tantôt ascétiques, pour se faire une silhouette attirante, tantôt excessives, par dégoût de soi.
Weil : une faim mystique et libératrice
Aliénante, la faim ne l’est peut-être que pour celui ou celle qui ne médite pas sur le corps. C’est du moins ce que laisse penser Simone Weil dans La Pesanteur et la Grâce (publié en 1947). La faim fait partie pour elle de « la pesanteur », non pas seulement du besoin mais « des mouvements naturels de l’âme qui sont régis par des lois analogues à la pesanteur naturelle ». Pourquoi les humains supportent-ils la souffrance des queues alimentaires pendant des heures alors qu’ils ne la supporteraient pas pour sauver une vie humaine ? Parce qu’une même action est plus facile si le mobile en est bas : « L’homme ne peut s’empêcher de se tourner vers n’importe quoi de comestible. » La faim est ainsi paradigmatique de la pesanteur. Mais il existe une autre faim qui, elle, nous grandit parce qu’elle est spirituelle : celle de Dieu. Simone Weil retrouve l’idéal du jeûne mystique : non pas une mortification du corps, mais la nécessité de « créer du vide en soi ». On peut choisir la faim parce que, lorsqu’elle est volontaire, le manque ressenti par le corps devient indolore tandis que l’âme, elle, détournée des choses d’ici-bas, peut espérer éprouver la joie d’être comblée par la grâce.
Pour conclure…
À l’heure où la famine menace toutefois, on ne saurait trop rappeler combien elle est une torture pour ceux qui la subissent et peuvent en mourir. Comme l’écrivait Knut Hamsun dans La Faim (1890), roman norvégien qui raconte les errances d’un écrivain affamé : « Je devais être inconcevablement maigre. Et les yeux étaient en train de rentrer dans la tête. De quoi avais-je l’air ? C’était le diable aussi d’être forcé de se laisser défigurer vivant, uniquement par la faim ! »
https://www.youtube.com/watch?v=ppXiE7-HOw4
https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/medecine-obesite-tue-trois-fois-plus-faim-monde-43574/
Questions
Quelles différences entre les documents ?
Quels sont les dangers évoqués par chaque document ?
Quelles solutions sont proposées ?
Citations
Honoré de Balzac, "La Peau de chagrin" : Le dîner, c'est la distraction du pauvre.
Françoise Sagan, "Bonjour tristesse" : Le repas est un moment délicieux et toujours trop court.
Jean Anthelme Brillat-Savarin, "Physiologie du goût" : Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es.
Molière, "Les Précieuses ridicules" : Vous êtes, sans doute, un très grand malade, Pour vouloir que chacun mange de la salade, Et que le même plat, sans rien y mettre au jour, Circule, à chaque assiette, avecque le même tour.
Guy de Maupassant La gourmandise réside dans l'exquise délicatesse du palais et dans la multiple subtilité du goût, que peut seule posséder et comprendre une âme de sensuel cent fois raffiné.
Cicéron : Il faut manger pour vivre mais non vivre pour manger
Sujets d’essais possibles :
Le repas est-il simplement une nécessité biologique ou un acte culturel pour vous ?
Dans quelle mesure les traditions alimentaires façonnent-elles l’identité culturelle d’une société ?
Peut-on considérer le repas comme un art en lui-même ?
Les repas en famille sont-ils un anachronisme ou restent-ils un pilier de la société moderne ?
Les grands repas festifs sont-ils un luxe ou une nécessité dans notre société actuelle ?
Peut-on dire que les repas collectifs renforcent toujours les liens sociaux ?
Les repas peuvent-ils être considérés comme une forme de communication non verbale entre les individus ?
Dans quelle mesure les repas jouent-ils un rôle dans les récits de notre vie, à l’image des scènes de films ou de livres ?
Un repas peut-il être un acte politique ?
Les manières à table sont-elles toujours un reflet fidèle des normes et valeurs d’une société ?
Dans quelle mesure les repas peuvent-ils servir de miroir aux changements sociaux ?
Les repas ont-ils le pouvoir de briser les barrières sociales ou au contraire de les renforcer ?
Les choix alimentaires sont-ils un indicateur fiable des inégalités sociales ?
Les repas peuvent-ils réellement contribuer à l’égalité sociale ?
En quoi les repas reflètent-ils les dynamiques de pouvoir au sein des sociétés ?
La malbouffe est-elle simplement un produit de la modernité ou un choix de société ?
Les médias ont-ils enrichi ou appauvri notre expérience culinaire ?
La gastronomie à l’ère des réseaux sociaux : évolution ou dégradation des traditions alimentaires ?
L’innovation dans les pratiques alimentaires est-elle toujours bénéfique pour la société ?
Les nouvelles tendances culinaires peuvent-elles redéfinir notre sociabilité ?
Les repas du futur seront-ils plus influencés par la technologie ou par le retour aux traditions?
Comment la cuisine a-t-elle évolué au cours de l’histoire ?
Quel est l’impact de la mondialisation sur les pratiques alimentaires ?
Comment les nouvelles technologies transforment-elles notre rapport à l’alimentation ?
Quel est le rôle de la cuisine dans le tourisme ?
Quels sont les facteurs qui influencent les choix alimentaires d’une famille ?
Comment concilier les traditions culinaires familiales avec les nouvelles modes alimentaires ?
Quel est l’impact des écrans sur les repas en famille ?
Comment les repas peuvent-ils contribuer à l’équilibre psychologique et émotionnel des individus ?
Comment le repas contribue-t-il à la construction de l’identité individuelle et collective ?
Quels sont les rites et les symboles associés aux repas dans différentes cultures ?
Comment les pratiques alimentaires ont-elles évolué au cours du temps ?
Quels sont les enjeux de l’alimentation dans la société contemporaine ?
Le repas, un acte culturel:
Les symboles alimentaires: Les aliments ont souvent une dimension symbolique forte, liée à des croyances, des traditions ou des événements particuliers. Par exemple, le pain et le vin dans la culture chrétienne, le riz en Asie, etc.
Les fêtes et les rituels alimentaires: De nombreuses fêtes sont associées à des repas spécifiques, qui marquent des moments importants du calendrier (Noël, Pâques, etc.). Ces repas sont souvent l’occasion de perpétuer des traditions et de renforcer le sentiment d’appartenance à un groupe.
FICHE METHODE : LES QUESTIONS SUR CORPUS
Temps : 1h30 /10
On propose deux à trois documents de nature différente (textes littéraires, textes non littéraires, documents iconographiques, tableaux statistiques, etc.) choisis en référence au thème inscrit au programme de la deuxième année de STS. Chacun d’eux est daté et situé dans son contexte. Le candidat répond de manière nuancée et argumentée à des questions (entre deux et quatre), confrontant les documents et invitant à les interpréter.
Le brouillon : un tableau de confrontation
Doc 1 Doc 2 Doc 3 Réponses
Question 1
A la lumière des documents 1 et 2, expliquez pourquoi « habiter une minuscule maison » peut contribuer à « élargir son horizon » (document 2) ? xxxxxxxxxxx
Question 2
Quels liens établissez-vous entre les documents 2 et 3 ? xxxxxxxxxxx
Question 3
Documents 1, 2 et 3 En quoi les habitats présentés dans les trois documents du corpus portent-ils un idéal de vie ?
-Répondre strictement à la question Bien cibler uniquement ce qui permet de répondre à la question: ce n’est pas au correcteur de faire le tri, votre esprit de synthèse et d’à-propos sera évalué.
-Rédiger intégralement sa réponse (pas de titres, ni de tirets).
-Présenter rapidement le corpus en introduction en nommant les auteurs et les titres
-Confronter les textes dans le développement: points communs et différences en rapport avec la question.
-Utiliser quelques exemples précis pour appuyer l’argumentation: au moins une référence précise à chaque texte. Les citations figurent entre guillemets et sont suivies du numéro de ligne entre parenthèses.
-Conclure brièvement en apportant une réponse à la question.
FICHE METHODE : L’EXPOSE
Pour le diaporama :
Simplicité et clarté :
Ne surchargez pas les diapositives : Un diaporama doit être visuel, avec des points clés. Utilisez des phrases courtes, des mots-clés, et des images pour illustrer vos propos.
Choisissez une police lisible : Préférez des polices simples (comme Arial, Calibri) et évitez les polices fantaisistes. La taille de la police doit être suffisamment grande pour être lue à distance.
Soyez attentifs à l’orthographe et à la syntaxe : vous avez peu de mots inscrits veillez à ne pas les estropier.
Cohérence visuelle :
Harmonisez les couleurs : Utilisez une palette de couleurs cohérente pour l’ensemble du diaporama. Évitez les couleurs criardes ou mal assorties qui peuvent distraire.
Utilisez des transitions simples : Les effets de transition doivent être discrets. Des animations trop complexes peuvent distraire l’auditoire.
Images et multimédia :
Illustrer vos points : Utilisez des images, graphiques, et vidéos pour appuyer votre message, mais assurez-vous qu’ils soient pertinents.
Qualité des images : Optez pour des images de haute qualité, évitez celles qui sont pixelisées ou floues.
Structuration du contenu :
Organisez votre diaporama : Commencez par une introduction (thème, plan), développez vos points principaux dans le corps de la présentation, et concluez avec un résumé et une conclusion.
Limitez le nombre de diapositives : Un diaporama trop long peut perdre l’audience. Préférez une diapositive par idée clé.
Interaction avec le public :
Intégrez des questions ou des citations : Cela peut stimuler la réflexion et l'interaction.
Préparez une diapositive de conclusion : Avec les points essentiels et éventuellement une ouverture pour les questions.
Pour l'exposé :
Maîtrise du contenu :
Connaissez votre sujet : Vous devez maîtriser le contenu pour pouvoir l’expliquer clairement sans lire vos notes.
Simplifiez les concepts complexes : Expliquez les idées complexes en les vulgarisant pour que votre audience puisse comprendre facilement.
Structure de l'exposé :
Introduction accrocheuse : Commencez par une accroche (anecdote, question) pour capter l’attention.
Plan clair : Annoncez le plan en introduction et respectez-le. Un bon exposé suit une progression logique.( attention, on n’annonce jamais la conclusion dans l’introduction)
Conclusion forte : Terminez par une conclusion qui résume les points principaux et ouvre la discussion ou pose une question.
Communication et langage corporel :
Parlez distinctement et à un rythme modéré : Prenez votre temps pour articuler chaque mot. Repérer vos tics de langage pour peu à peu les éviter ( ben, quoi, alors…)
Utilisez des gestes naturels : Le langage corporel doit soutenir votre discours sans être exagéré.
Contact visuel : Maintenez le contact visuel avec l’audience pour créer une connexion et éviter de lire directement vos diapositives.
Gérer le stress :
Répétez : Entraînez-vous à plusieurs reprises, si possible devant un public, pour gagner en confiance.
Respirez : Prenez des respirations profondes pour gérer le stress avant et pendant l’exposé.
Interaction avec le public :
Encouragez les questions : Laissez du temps pour des questions à la fin et soyez ouvert aux discussions.
Soyez réactif : Répondez aux questions de manière concise et restez ouvert aux remarques ou aux corrections.
Derniers conseils
Faites attention à votre posture : ne soyez pas trop décontracté dans votre tenue vestimentaire ou dans votre attitude.
Respectez le temps imparti : assurez-vous que votre présentation ne dépasse pas le temps alloué.
Soyez préparé pour des imprévus : préparez-vous à improviser si quelque chose ne se passe pas comme prévu (problème technique, questions inattendues).
En suivant ces règles, vous serez en mesure de réaliser un diaporama efficace et un exposé percutant.
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